Actrice - Keith Dixon 3 стр.


Bien quil y avait une cave en bas avec un DJ, la pièce du fond était lendroit où se réunissaient la plupart des gens que Mai connaissait. Cétait plus calme, dune part, et plus facile à échanger des potins. La pièce était subtilement éclairée telle la chambre noire dun photographe, rendant relativement facile à éviter des personnes simplement en leur donnant du dos et en prétendant ignorer leur présence. Lorsquelle traversa la porte, des dizaines dyeux brillants se tournèrent vers elle dans lombre, telle une horde de lions ayant repéré une gazelle.

Stefan la remarqua immédiatement, son visage silluminant sous ses cheveux blonds coupés courts. Il la rejoint, lui saisit le bras et la dirigea vers une table vide, de sa manière solidaire et comique exagérée. Il portait un T-shirt gris serré de Pineapple Studio et des chinos noirs, la peau légèrement luisante, comme sil venait de faire des exercices. Ils sassirent sur les chaises en cuir que Derek avait sauvées dun club en faillite dun gentleman.

Stefan se pencha avec attention.

- Maintenant, jeune fille, dis-moi tout. Comment sest passé ton premier jour ?

- Suis-je obligée de te le dire ?

- Tu ne vas pas me refuser la chance de rumeurs, nest-ce pas ? Y a-t-il une personne dont je devrais être au courant ?

- Et voilà, moi qui pensais que tu tintéressais à moi

Les yeux de Stefan souvrirent plus grands.

- Oh, mon cœur, je le suis. Je le suis vraiment. Mais on doit établir certaines priorités. La romance est indéniable. Alors comment cétait, vraiment ? Atroce, ou joyeux ?

- Je ne connais personne dautre qui utiliserait le mot joyeux dans une conversation.

Stefan écarta ses bras comme pour dire : Cest le miracle de ma personne.

- Ils ne servent plus de boissons, ici ? dit Mai.

- Hmm Suis-je en train de sentir une certaine réticence à parler aujourdhui ? Cétait mauvais ?

- Disons que Pedro ne devrait pas faire de la politique. Ses perspectives de carrière seraient limitées.

- A-t-il été cruel ?

- Je crois quil aimerait quon dise honnête.

- Eh bien, mon humble avis est il va se faire foutre.

- Je suis contente que tu y aies pensé.

Stefan sourit.

- Laisse-moi toffrir un verre. Comme dhabitude ?

- Sil-te-plaît. Pas trop de vin blanc.

Stefan alla au bar chercher le spritzer qui était sa boisson préférée. Ses yeux sétaient maintenant acclimatés, elle jeta un coup dœil aux gens dans la pièce ils étaient pour la plupart dans la vingtaine ou au début de la trentaine, coiffées de manière éblouissante, chaussures brillantes et dents uniformes. Dans les médias de tout genre la télévision, les magazines, la mode. Elle connaissait beaucoup dentre eux, ou du moins savait ce quils faisaient : Stefan était un guide compétent pour savoir qui était qui dans les médias de Londres. Il était un an plus âgé quelle et était passé directement de son lycée de la région rurale de Northampton au centre de Londres, pour apprendre dabord la danse avant den faire son métier. Il venait juste de décrocher son premier boulot important dans une compagnie de danse contemporaine. Elle était fière de lui.

Il revint et sassit à côté delle, en tournant sa chaise pour faire face à la salle. Il sinstalla comme sil regardait la télévision.

- Ils sont tous là, ce soir, cest bien pour un lundi ! Ce garçon avec la moustache ratée tu le reconnais ?

- Non, ni la moustache, dailleurs.

- Il a remporté la demi-finale de Generation Ex de la semaine dernière. Il est venu avec cette fille au bar aux bras maigres avec le haut bleu Salvation Army. Bientôt une ex, je pense.

- Comment tu sais ces choses ? Tu reçois des emails que je ne reçois pas ?

- Une heure le matin à faire mes exercices je me règle sur les bonnes stations et le monde entier est là. En plus dun flux de lapplication MailOnline.

- La ligne directe vers lenfer.

- Je sais, mais que veux-tu quun toxicomane de la rumeur fasse ? Alors dis-moi, comment va Alfie ?

- Je te le dirai quand je le verrai.

Stefan simprégna dun visage sympathique avant de se tourner vers elle.

- Oh, ma chérie.

- Les répétitions pires que les miennes. On dirait quil en aura pour des mois. Leur premier concert sera cette semaine.

- Préviens-moi et je viendrai avec toi. Tu pourrais avoir dune béquille sils se cassent et brûlent. Juste pour dire.

- Ça ne me dérangerait pas, mais il na pas donné de nouvelles. Tu sais, cest mon premier jour de répétitions. Sy intéresser un peu ne lui ferait pas de mal.

- Cest un garçon occupé.

- Ne le défends pas, Stefan. Tu aimes trop le drame pour que tu sois arbitre.

- Tes sûre que tu nes pas allée à luniversité ? Des grands mots et tout !

- Luniversité de la vie, vieux mec. Un studio de télévision. On apprend vite sinon on se noie. On grandit à la vitesse grande V.

- Et on devient dure comme de vieilles bottes.

Mai sourit pour la première fois. Stefan savait que la décrire était aussi difficile que dêtre ironique. Il avait reçu trop de coup de fil tard la nuit de sa part depuis deux ans pour croire quelle était dure.

- Alors, tu vas bien, vraiment ? demanda-t-il.

- Ça va passer.

- Ce nest pas suffisant, chérie. Je me casse les couilles et le dos, parce que je veux que tu fasses ce que je fais. Je ne veux pas apprendre que tu te prends au jeu. Ce nétait pas notre marché. Sois tu veux le faire, sois tu ne veux pas. Il y a beaucoup dautres personnes qui aimeraient être à ta place.

- Mon Dieu, Stefan, je vais bien, vraiment. Cest juste que jaie eu une première journée difficile. Si je ne peux pas râler et me plaindre à toi, à qui dautre pourrais-je le ferai ? As-tu un numéro que je peux appeler ?

Stefan lui lança un visage sévère, puis lui fit un clin dœil :

- Juste pour vérifier. Tu es bonne, alors ne te sous-estime pas.

Mai lui donna un coup sur le bras.

- Et sur ce, je vais aux toilettes.

Elle se leva et se dirigea vers le fond du bar bondé. Lair lui-même semblait briller dun éclat réfléchi par les hommes et les femmes qui se tenaient debout héroïquement au bar ou assis avec une intimité préfabriquée aux tables cloîtrées. Elle sentit le bruit de la pièce en dessous et saisit une explosion de musique, comme une brise chaude, lorsquelle traversa une porte de secours ouverte.

Sur le point dentrer aux toilettes, elle entendit une personne lappeler. Elle reconnut la voix et prit un soupir avant de se retourner.

Helena Cross était assise avec deux jeunes hommes à une table basse, lui lançant un grand sourire ; elle avait toute la sincérité dune animatrice de télévision, sans le charme frigorifiant. Ce soir, elle portait une robe échancrée bleue pâle et le haut de ses seins étaient gonflés de manière attrayante, comme sils étaient poussés par des mains ludiques.

- Mai, dit-elle, contente de te voir. Jai entendu dire que tu avais commencé les répétitions.

Elle garda son sourire en plastique assez longtemps pour préparer Mai au défi.

- Alors, comment ça se passe ? Jai entendu dire que ton directeur peut être un vrai petit Hitler.

- Helena je suis contente de te voir, dit-elle jetant un coup dœil aux deux hommes chacun à leur tour : jeunes pâles aux cheveux noirs et épais. Qui sont ces garçons ?

- Mai, dit-elle, contente de te voir. Jai entendu dire que tu avais commencé les répétitions.

Elle garda son sourire en plastique assez longtemps pour préparer Mai au défi.

- Alors, comment ça se passe ? Jai entendu dire que ton directeur peut être un vrai petit Hitler.

- Helena je suis contente de te voir, dit-elle jetant un coup dœil aux deux hommes chacun à leur tour : jeunes pâles aux cheveux noirs et épais. Qui sont ces garçons ?

Helena était de quelques années plus âgée que Mai et comprit la remarque désobligeante. Elle préféra lignorer.

- Ils sont tous les deux très gentils, dit-elle en les regardant chacun son tour pour quils se levèrent tous deux et serrent la main de Mai comme si Helena leur avait envoyé des instructions par télépathie.

- Jasper.

- Tarquin.

- Wow, on donne encore ces noms aux garçons ? dit Mai.

Les jeunes hommes baissèrent leurs têtes presque identiques. On aurait pu plutôt les appeler Harry ou Max ou même Jude.

- On dirait que je narrive pas à échapper à leur attention, dit Helena. Je vais partout incognito et ils débarquent toujours, comme des paparazzis sans caméras. Je crois quils payent quelquun pour me suivre. Ils découvrent où je vais être, se lavent les cheveux, se brossent les dents et me coincent comme Bambi - elle chercha une image sans défense. Jaimerais pouvoir dire que je naime pas lattention, mais on profite de loccasion lorsquelle se présente, nest-ce pas ?

- Je suis sûre quils sont des garçons très bien élevés, dit-elle en les regardant. Nest-ce pas ?

Ils sourirent tous deux, aussi habiles que des vicaires inoffensifs. Être offensant juste une fois signifierait le bannissement de la table haute de la célébrité à moins que la table ne vous appartienne.

- Alors, tu as vu lhistoire de Deannah, dit Helena gaiement. Bien sûr, tu vas tenter le coup.

- Et toi ?

- Les premiers votes ont déjà été lancés. Je ne voulais pas, mais Finn men a persuadé. Tu sais comme il peut être un dur petit oiseau. Plus un petit perroquet méchant sur les épaules quun agent. On ma dit que jétais déjà une grande favorite. Tu timagines !

- Cest bien. Tu dois être très contente.

- Oh oui, vraiment. Je ne vois vraiment pas doù sera tirée la concurrence as-tu une idée ?

Elle sétait trahie en retenant son lumineux sourire une seconde de trop. Elle était inquiète, pensa Mai. Elle ne veut pas que je tente le coup.

Mai avait battu Helena dans le rôle de Steffi dans Amberside Terrace il y a deux ans de cela et elle ne lavait jamais pardonnée, même si Helena avait trouvé une place aux yeux du public comme une célébrité qui performait de temps en temps dans les comédies musicales de West End et dansait dans des émissions télévisées. Mai nétait pas du genre à jubiler, mais dans le cas dHelena, elle était parfaitement disposée à faire une exception.

- Je dois y aller. La nature mappelle, dit elle.

- Alors tu ne vas pas tenter Deannah ?

- Ce serait vendre la mèche, sourit Mai.

- Parce que les gens du Daily Paper ont dit quils me soutenaient. Je plais, apparemment, au mec russe, le propriétaire. La compétition sera uniquement une sorte de publicité, mais il veut que ce soit moi la gagnante.

En poussant la porte pour entrer dans les toilettes caverneuses pour femmes, les lumières sallumèrent à lintérieur tel le pont de Starship Entreprise, pensa Mai : elle naurait jamais dû me dire ça. Elle avait réalisé quelle avait décidé de ne participer pas à la compétition. Elle avait trop à faire les quatre semaines à venir pour perdre son temps à autre chose. Mais une chose avait attisé une étincelle concurrentielle : peut-être était-ce lidée que le rôle soit attribué à une personne qui ne le comprenait pas. Uneactriceprometteuseprendunedécisiontrès importantedans les toilettes dun club. Cétait lun de ces moments déterminants qui laissait une petite trace dans sa conscience quelle connaissait bien, quelle narriverait jamais à oublier ou à effacer, telle une entaille de couteau sur un placard Chippendale.

Lorsquelle sortit des toilettes, Helena était toujours assise à sa table, mais seule. Sans le sourire cette fois, latmosphère avait changé. Mai sentit quelle avait renvoyé les garçons pour quils ne soient pas témoins de ce qui allait se produire. Helena se leva de sa chaise et sapprocha de Mai, qui put distinguer maintenant les taches de rousseur barbouillées de maquillage. Gros plan, visage large, les yeux écarquillés et une grande bouche trop frappants dans les photos professionnels cétait grossier et presque moche. Une vigilance sauvage apparut dans ses pupilles sombres.

- Je sais ce que tu fais, dit-elle à Mai. Je tai vu déjà vu le faire et je ne permettrai pas que cela recommence !

Mai se sentit reculer.

- Je suis venue ici pour rencontrer un ami. Je suis désolée si tu narrives pas à supporter cela.

- Ha ha, putain toujours aussi intelligente et pleine desprit. Les mots ne te manquent jamais, cest ça, grande maline ? Jai vécu une vie entière à avoir affaire à des gens comme toi et je ne compte pas perdre à nouveau. Je vais avoir ce rôle, cette femme Deannah, et je vais te battre pour le faire.

- Je pense que tu ferais mieux déviter le gin. Ça te donne des illusions.

- Tu te la joues décontractée maintenant, parce que cest ta spécialité. Toujours en contrôle, toujours la petite fille souriante, qui simplique jamais, qui ne laisse jamais tomber. Je sais ce que tu fais. Laisser les gens venir à toi au lieu daller toi-même vers eux, parce que, oh non, on ne doit pas putain voir que tu veux quelque chose, cest ça ? Pour quensuite on voit que ce nest pas facile pour toi, nest-ce pas ? Tu dois te la jouer décontractée.

- Tu las déjà dit. Tu te répètes. Est-ce que je peux passer ?

- Rappelle-toi, petite Mai, tu ne vas pas gagner cette fois-ci. Tu as gagné la dernière fois, fille de la putain Geraldine Rose, putain de vedette de cinéma ratée. Mais cette fois, jai des gens de mon côté. Cest mon tour. Et tu nas pas putain intérêt à loublier.

Mai évitait ses yeux et sétait fait poussé en arrière vers la porte des toilettes pour femmes. Elle se redressa alors, regarda directement dans les yeux dHelena et se pencha en avant au niveau des hanches pour que lautre femme soit obligée de reculer petit à petit.

- Pour ton information, dit Mai savourant le ton de la phrase dans sa bouche uniforme lorsquelle le dit et le répéta, pour ton information, je navais pas lintention de jouer le jeu. Jallais dire, Merci mais non, sils me loffraient. Je te remercie beaucoup. Je te remercie de mavoir fait changer davis. La partie commence, pute !

Elle passa en la poussant, sachant quHelena la fixait dans son dos et espérait que sa grande bouche soit toujours légèrement ouverte ça ne lui allait pas du tout.

Elle fit signe à Stefan en passant devant lui et se dirigea directement vers Patty Leading, léditrice du showbiz pour Daily Paper. Elle tenait à ce qui ressemblait à une Bloody Mary dans une main maigre, une caméra Canon haute-définition dans lautre. Son corps était de la minceur osseuse dune personne qui se punissait par des exercices, plutôt que par déni. Elle parlait avec un jeune homme aux cheveux roux que Mai reconnut comme étant le membre rebelle dun nouveau groupe de garçons. Il portait des basquets Adidas rouge brillant. En public.

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