Elle était la seule au monde à avoir la capacité de lui couper le souffle sans même essayer. Sa chevelure auburn cascadait en couches épaisses de larges boucles bondissantes... Un corps de déesse... Sa prêtresse. Il la regarda quand elle ralentit et s'arrêta près du lit, vraisemblablement perdue dans ses pensées. Elle se hissa sur le matelas et se mis en boule, un des oreillers serré contre la poitrine.
"Tout est si calme Maman... Papa. J'aurais voulu que Tama rentre à la maison. Alors peut-être ce silence ne serait plus si assourdissant," Kyoko soupira, étendue sur le flanc, ne se donnant même pas la peine de ramper jusque sous les couvertures. Clignant des yeux à plusieurs reprises elle ressenti l'épuisement qui s'emparait d'elle.
Hyakuhei s'assit sur le lit à ses côtés, la regardant respirer. "Tu n'as plus longtemps à attendre, Kyoko... Ton souhait deviendra réalité. Tu ne seras plus jamais seule." Profitant de l'énergie d'un instant, son corps se matérialisa en flamboyant alors qu'il saisissait la couverture au pied du lit. Il la remonta lentement sur son corps puis s'inclina vers elle et posa doucement un baiser sur sa tempe avant de s'évanouir dans les airs.
*****
"Il nous tuera s'il ne reste plus de pizza !"Kamui tenait fermement une extrémité de la boîte à pizza alors que Shinbe et Kotaro agrippait l'autre comme si la rigidité cadavérique s'était emparée de leurs mains. Kamui lâcha aussitôt que la porte s'ouvrit et rigola lorsque Shinbe et Kotaro déposèrent lentement la boite face à la chaise de Toya comme s'ils l'avaient protégée pour lui.
Lorsque Toya ne s'emporta pas contre eux comme à l'accoutumée, Kyou leva les yeux de son ordinateur portable et regarda Toya prendre place à table... La mauvaise place. Il releva un sourcil sombre lorsque Shinbe et Kotaro haussèrent les épaules et ouvrir la boîte à pizza de Toya. Il commencèrent à la dévorer. Toya ne leur jeta pas un regard.
"Toya," tenta Kyou, s'alarmant pour de bon lorsque Toya ne sembla pas l'avoir entendu.
Fermant le clapet de l'ordinateur portable, il attrapa Toya par les épaules et entrepris de le secouer mais Toya tressaillit, le regardant comme s'il sortait d'un état de choc. Kyou se demanda en silence si Toya avait fait la rencontre d'un autre des démons qui erraient près de la maison. Il étala sa perception sensorielle jusqu'à envahir l'aura de son frère mais ne ressenti aucune trace de contact avec les démons... A la place, quelque chose de bien plus perturbant.
"Il s'est passé quelque chose ? " Demanda Kyou en entendant le claquement rapide du sang de Toya juste sous sa peau.
Toya hocha la tête... Puis leur fit à tous une peur bleue lorsque ses lèvres se relevèrent en un sourire. Toya ne souriait jamais. "Je pense que demain nous avons école."
"Voilà , tu veux reprendre ta pizza ?" Shinbe fit tomber la part qu'il venait de mordre puis donna une claque sur la main de Kotaro, le faisant lâcher à son tour la part qu'il venait de dérober dans la boîte également. Il fit lentement glisser la boîte à travers la table jusqu'à ce qu'elle se trouve face à Toya.
"Tu aurais pu te contenter de te battre avec nous pour la ravoir au lieu de faire peur à tout le monde avec ton sourire bizarre," râla Kotaro.
"Je ne crois pas qu'il rigolait," Dit Shinbe en fixant de son regard améthyste les grands yeux dorés de Toya. Il s'adossa sur sa chaise, à présent qu'il avait l'attention de tout le monde. Voyant cet air de stupéfaction qui essayait d'envahir à nouveau le regard de Toya il soupira. "Et pourquoi voudrions-nous subitement nous joindre à ces tarés du lycée Hormones Are Us ?"
"Pour la simple raison que la fille qui vient dâemménager en face y fait sa rentrée demain." La respiration de Toya était légèrement saccadée maintenant qu'il avait prononcé ces mots.
Alors que plusieurs chaises s'éloignaient de la table, Kyou abattit ses paumes sur le plateau de cette dernière dans un claquement sonore. "Assis !" C'était comme lorsqu'on appuie sur le bouton pause de la télé et qu'on faisait un lent retour en arrière. Une fois que tous se furent exécuté, il se retourna vers Toya. "Dis-nous de quoi tu parles."
"Elle est seule... C'est elle." Toya se frotta la tempe bien qu'il sache parfaitement qu'un gardien ne pouvait avoir de maux de tête. "Kyoko... Elle parlait à la carafe au dessus de la cheminée. C'est comme ça que je sais qu'elle commence l'école demain."
"Elle est comment ?" Demanda Kamui avec la même expression dans le regard que celle qui avait hanté celui de Toya quelques instants auparavant.
"Je ne lui ai pas parlé," admis Toya, ses épaules tombant de quelques centimètres. "Je n'ai pas pu, mais elle portait un de ces habits qu'ils mettent dans les pensions."
"Nous pouvons retrouver l'endroit ou elle était si son dossier a déjà été transféré à l'école du coin." ajouta Kotaro à point.
"On s'en occupe, "Kamui s'empara hardiment de l'ordinateur portable de Kyou. Il connaissait une entrée secrète pour infiltrer la base de données du système informatique du lycée car il avait régulièrement vérifié les dossiers des écoles environnantes afin d'identifier toute inscription ou désinscription d'élèves d'âges correspondant à ceux de Kyoko ou de Tama.
"Tu es certain que c'est elle ?" Demanda Kyou à Toya en se penchant en avant sur son siège.
"Nous l'aurions reconnue au premier regard. Kyoko est l'image vivante de la statue à la jeune-fille..." Toya ferma les yeux, savourant le fait que jusque là , il était le seul à l'avoir vue. Si il piochait dans cette part de lui qui fut Tadamichi... Alors il pouvait même se rappelait le goût de Kyoko. Si les autres gardiens connaissaient son secret, ils en auraient été jaloux. "Des yeux couleur d'émeraude, des cheveux auburn mais elle semblait fragile... Comme si elle était encore une petite fille."
"C'est aussi mon avis," acquiesça Kamui alors que ses yeux s'écarquillaient devant l'écran. "Son dossier indique qu'elle a passé sa vie dans une école pour filles au milieu de nulle part depuis l'âge de trois ans. Kyoko Hogo, age : 17 ans. Toutes les informations sont ici et j'ai même son emploi-du-temps pour la journée de demain."Il fronça les sourcils, "Mais je ne vois rien ici indiquant que son frère entre à l'école avec elle."
Toya secoua la tête. "Je sais que nous avions espéré qu'ils étaient quelque part ensemble sains et saufs mais Tama semble n'avoir jamais été avec elle. Elle est complètement isolée là -bas. Rappelez-moi encore pour quelle raison on ne peut pas se contenter de lui dire qui nous sommes ?" Il connaissait déjà la réponse, elle lui déplaisait juste royalement car il voulait lui dire.
Kamui leva les yeux de l'ordinateur portable en répondant d'abord. "Nous avons déjà mis cela au vote auparavant. N'importe quelle personne saine d'esprit appellerait sans doute la police si nous devions lui révéler qui nous sommes réellement. Elle est humaine, Toya... Elle n'a pas la moindre idée de ce que c'est qu'être une prêtresse. Nous devons être prudents."
Shinbe renchérit, " De plus, la dernière chose dont nous avons besoin ou que nous voulons c'est d'avoir la police des polices qui fouillent dans nos affaires parce que les flics enquêtent sur nous pour suspicion de harcèlement de la voisine. Et si les démons apprennent que la prêtresse est de retour, ils provoqueront sûrement quelques problèmes qui attireront déjà l'attention de la police de toutes façons. Ce sera déjà assez dangereux avec notre apparition au lycée demain."
Shinbe renchérit, " De plus, la dernière chose dont nous avons besoin ou que nous voulons c'est d'avoir la police des polices qui fouillent dans nos affaires parce que les flics enquêtent sur nous pour suspicion de harcèlement de la voisine. Et si les démons apprennent que la prêtresse est de retour, ils provoqueront sûrement quelques problèmes qui attireront déjà l'attention de la police de toutes façons. Ce sera déjà assez dangereux avec notre apparition au lycée demain."
"De plus, si nous débarquons subitement pour lui dire que des démons l'ont traquée quand elle avait trois ans et qu'elle nous croit... Ensuite elle se sentirait probablement coupable de l'assassinat de sa famille," ajouta Kotaro comme justification.
Toya regarda les autres gardiens d'un Åil sévère, n'aimant pas, une fois de plus, les réponses. "Vous avez plus que pensé à tout, n'est-ce pas ? "
"Tu espères quoi ? Nous avons eu quinze ans pour retourner la question dans tous les sens." Kamui adressa un sourire d'excuse à Toya.
"Shinbe, je pense que tu devrais aller vérifier les boucliers anti-démons qui entourent la maison." Kyou fit un signe de tête vers Shinbe et brusquement, ils n'étaient plus que quatre dans la pièce.
"Putain, il est parti si vite que j'ai senti le courant d'air." Kotaro frotta son bras comme si le vent l'avait frigorifié.
Les doigts de Kamui dansaient sur le clavier pendant qu'il parlait. "J'ai toujours tout arrangé pour que ça donne l'impression que notre père adoptif nous ait fait suivre une scolarité à la maison. Et avons tous atteint un niveau Terminale. Dès demain, nous rejoignons l'école publique afin de pouvoir passer notre diplome comme n'importe quel ado normal."
"Oh, ça ne va mettre la puce à l'oreille de personne," déclara Kotaro d'un ton sarcastique. "Cinq frères qui commencent tous en même temps dans la même classe. Même si les profs l'acceptent, on sera quand même le sujet de conversation de tout le lycée en ce qui concerne les élèves. Ce n'est pas comme si nous avions la moindre chance de nous faire passer pour de véritables ados."
"Essaye," Kamui lui lança un regard inexpressif. "De toutes façons, vous me devez de la gratitude. Je vais faire des changements dans tous nos emplois-du-temps afin qu'il y ait toujours au moins un d'entre nous en cours avec Kyoko. J'ai mis à jours nos dossiers scolaires chaque année depuis la maternelle, de manière à ce que nos âges respectifs correspondent au sien si elle devait refaire surface."
"Par pure curiosité," dit Kotaro d'un air taquin, "T'aurais fait quoi si la prêtresse était revenue à l'âge de dix ans ?"
"Fiche moi la paix," Kamui lui lança un regard noir. "Ou je ferais baisser toutes tes notes."
Changeant complètement de sujet, Kyou fit une remarque, "Si j'ai raison, les démons étaient jusque là incapables de la localiser car son pensionnat se trouve en terre consacrée... et pour cette même raison nous ne pouvions la trouver. Jusque là les démons se sont déployés en provoquant des dégâts ici et là . Mais à présent, ils pourront renifler sa trace et reviendront un à un."
Sa voix devint si glaciale qu'elle aspira toute la chaleur de la pièce instantanément. "Et ce n'est pas parce que nous n'avons pas détecté de traces d'Hyakuhei dans ce monde qu'il n'est pas ici."
"Nous savons qu'il est ici." Toya gronda sentant enfler la haine en lui puis il se calma brusquement. "Nous sommes venus en ce monde pour pouvoir être à ses cotés et la protéger. Elle ne devrait pas être laissée là -bas seule une seule minute."
"Nous sommes tous du même avis, Toya... mais il faut te rappeler que c'est une innocente. C'est pour cela que nous allons devoir devenir ses nouveaux meilleurs amis," l'informa Kyou.
"Et exactement de quelle façon compte tu parvenir à ça ?" rétorqua Toya.
"Ta maman ne t'a donc pas appris à être amical ?" Kamui eut un sourire moqueur mais son regard s'emplit de panique lorsque Toya se leva promptement.
Toya remarqua le mouvement de recul de Kamui et leva un sourcil sévère. "Je vais seulement aller voir ce qui prend tant de temps à Shinbe."
*****
Shinbe s'assura que les pièges anti-démons n'avaient pas été dérangés, même si sa préocupation principale n'était pas les démons mais bien autre chose. Le fait qu'Hyakuhei ai pu traverser le champ de force protecteur autour du Coeur du Temps en disait long sur l'étendue du danger dans lequel se trouvait réellement la prêtresse. Bien sûr, les protections contribueraient à la garder dissimulée et à garder à l'écart les plus faibles des démons qui tenteraient de franchir les limites, mais ce ne serait pas suffisant pour arrêter Hyakuhei si il décidait de se montrer.
Si il savait une chose à propos d'Hyakuhei, c'était que le seigneur démon avait de la patience... suffisamment de patience pour avoir fait le mort pendant les quinze dernières années. Les quelques démons que les gardiens avaient arrêté alors qu'ils venaient espionner, ils les avaient détruits. Mais à présent que la prêtresse était là ... il était impossible de dire ce qui allait sortir de l'ombre. Elle aurait besoin d'une meilleure protection.
Lorsqu'il vit s'allumer une des pièces à l'étage, Shinbe se mit rapidement à escalader le mur extérieur, incapable de se retenir. C'était comme si son âme même était attirée par elle. Ses yeux améthystes luisaient alors qu'il regardait par la fenêtre et la voyait debout dans l'immense salle de bain. Toya avait eut raison... il l'aurait reconnue n'importe ou.
Il la regardait faire de gracieux mouvements alors qu'elle tendait la main dans la douche afin de tester la tempétature de l'eau. Il tenta de se détourner, mais lorsqu'elle commença à déboutonner son corsage, il avait perdu toute volonté... il était gelé sur place.
"Alors c'est à ça que la statue de la jeune fille ressemblerait sans vêtements," Shinbe repris son souffle puis se mit à grimper un peu plus haut afin de voir plus aisément son corps tout entier et non uniquement de la tête à la taille. Il perdit subitement ses appuis lorsqu'un bras passa autour de son cou et le tira en arrière.
Toya grogna lorsqu'il toucha le sole, tombant à plat sur le dos, mais ce ne fut rien à côté de Shinbe lorsqu'il tomba par dessus lui."Dégage ! vociféra Toya.
"Lâche mon cou et je le ferais," siffla Shinbe en plantant son coude dans les cotes de Toya. Toya repoussa Shinbe et fit une roulade pour se remettre sur ses pieds. "Tu es censé être en train de vérifier les protections anti-démons, pas..." Il fit un geste en direction de la fenêtre,"... tu n'es qu'un pervert, tu sais ça ?"
"Je voulais simplement la voir." Shinbe commença à lever à nouveau le regard vers la fenêtre mais le grondement menaçant de Toya l'arrêta.
"Je pense que tu en as vu assez." Les yeux dorés de Toya étaient mêlés d'un tourbillon couleur mercure.
Shinbe se demanda si cela valait la peine de rappeler à Toya qu'il y avait bien plus encore à voir mais il savait quand ne pas pousser le bouchon. "Bien, il aura toujours le vestiaire des filles au lycée demain." Cela lui valu une claque retentissante mais il se contenta de rigoler.
"Allez, viens, on a une réunon qui nous attend." Toya repris le chemin de leur maison poussant Shinbe devant lui pendant tout le trajet.