L'Ombre De La Mort - Amy Blankenship 6 стр.


Sortir de la maison aidait certains, mais seules ses oreilles éprouvaient l'effet de cet isolement. Il fixa l'anneau en regrettant de ne pouvoir le retirer de son doigt quelques minutes. Avant, il aurait dû se concentrer pour ressentir les émotions de Tiara... maintenant, il semblait ne plus réussir à s'en défaire. C'était comme d'être entre le marteau et de l'enclume.

Il regarda sa main trembler un moment avant d'enfouir le bout de ses doigts dans sa poche plus ou moins consciemment. Il ne voulait pas que quelqu'un sache qu'il avait des problèmes avec l'anneau, de peur qu'on le lui enlève et qu'il ne fasse plus partie du club.

Le problème, c'était que… par moments, il était sujet à des poussées de fièvre, et de sinistres tentations lui traversaient l'esprit depuis deux jours. Des pensées d'un genre bien sombre, et tout à l'opposé de sa personnalité. Jusqu'ici il les contrôlait, mais si cela s'aggravait, il savait qu'il allait devoir en parler aux autres.

Les petits poils sur ses bras se dressèrent et Jason eut l'impression d'être observé. Il tourna la tête et posa un regard méfiant sur un grand arbre au loin. Pendant un instant, il se demanda si la silhouette qu'il venait d'y voir était un simple effet de son imagination ou peut-être un fantôme.

Jason fut dérangé dans ses pensées lorsqu'il entendit soudain un cliquetis derrière lui. Il fit volte-face en pensant qu'un Faucheur avait réussi à survivre au « nettoyage » du cimetière pour les suivre jusque là.

« Je t'ai eu, le nargua Guy en riant. Tu aurais dû voir ta tête. Je suis étonné de constater que ton pantalon est toujours sec.

Jason adressa à Guy un petit sourire mais ne releva même pas.

Guy cessa de rire, en remarquant que Jason n'avait pas l'air en forme.

— Tu sens que ça va aller, ce soir ? On pourrait croire qu'un anneau qui te rend invincible t'empêche aussi d'être malade.

— Je ne suis pas malade… c'est juste que je n'ai pas bien dormi, rouspéta Jason, en plongeant un peu plus sa main dans la poche de son jean. Peut-être était-il temps d'en parler à quelqu'un et après tout, Guy n'était pas un mauvais choix puisqu'il pratiquait la magie. Il poursuivit : Fut un temps où je devais me concentrer pour savoir ce que ressentait Tiara... et maintenant que l'anneau recommence à marcher, j'en tire plus que ce que j'avais imaginé. Ce qu'il y a d'étrange là-dedans c'est que… cet anneau me donne peu à peu l'impression d'être hanté.

— Que veux-tu dire ? l'interrogea Guy, redevenu sérieux.

Jason secoua la tête, ne sachant comment l'expliquer :

— Rien, c'est sûrement la fatigue due au décalage horaire… passer d'humain à surhomme en l'espace de zéro seconde est très fatiguant, en fin de compte.

— Je me demande ce qui prend tant de temps à Zachary et Tiara, fit observer Guy en s'asseyant sur les marches pendant que Jason s'appuyait contre l'un des montants entourant le porche.

— Ouais, je me le demande, répondit Jason qui avait envie de lever les yeux au ciel face à cette question, mais il remercia secrètement Guy d'avoir dévié la conversation du sujet de l'anneau. Il désigna l'arbre d'un signe de tête avant d'ajouter : Je pense avoir vu Faucon-de-Nuit il y a quelques minutes... là-bas, en train d'observer la maison.

L'air inquiet, Guy se tourna dans la direction que Jason leur indiquait. Il se demanda ce que l'Indien s'apprêtait à faire. Carley l'avait surpris à quelques occasions en train de chercher un sortilège qui pourrait rendre visible Faucon-de-Nuit et lui avait dit de laisser tomber. Elle semblait sérieuse, alors il avait abandonné l'idée. Il était content qu'ils aient apportés tous leurs grimoires et parchemins à la maison. C'était un excellent moyen de tuer le temps et aussi de faire abstraction… du bruit.

— Il n'est pas vraiment du genre amical, pas vrai ? demanda Jason.

Guy haussa les épaules.

— Il n'a pas à l'être, sa loyauté va à Tiara.

Faucon-de-Nuit les dépassa pour entrer dans la maison. Son voyage chez les esprits le menait à la chambre de Tiara... un endroit où il s'était rendu plusieurs fois sans jamais y rester longtemps. Il apparut soudain dans la pièce, en observant silencieusement Tiara et Zachary qui achevaient de se rhabiller.

Zachary arriva derrière Tiara alors qu'elle enfilait une culotte puis il passa un bras autour d'elle.

— Le pire dans la journée c'est quand tu décides de te rhabiller, la taquina-t-il en déposant un baiser sur son épaule nue.

Tiara s'esclaffa et s'empara de la jupe avant que Zachary ne la convainque de sécher le travail pour cette nuit.

« Nous verrons Craven seuls, cette nuit », lui dit Faucon-de-Nuit.

Tiara fit un bond et posa une main sur son cœur.

— Arrête de me faire peur comme ça.

— Comme quoi ? releva Zachary, perplexe.

— Pas toi… Faucon-de-Nuit, répondit Tiara avec un doux sourire, mais en nouant rapidement sa jupe sur ses hanches.

Déjà qu'elle ne s'était même pas rhabillée de moitié.

— Qui, lui, cet insaisissable, invisible Indien qui n'a pas le moindre soupçon de sociabilité ou de personnalité et qui aime à se balader dans les chambres des autres pendant que nous avons un moment d'intimité ? releva Zachary, alors que la température de la pièce grimpait de plusieurs degrés.

Tiara réprima l'envie irrésistible de se remettre à pouffer tandis qu'elle inventait un mensonge :

— Il n'est pas comme ça et tu le sais.

— Je ne le sais pas, grommela Zachary. Tout ce que je sais, c'est qu'il nous regarde en ce moment même et écoute tout ce que je dis sur lui. Tout ce truc consistant à te regarder d'un point de vue invisible est plutôt flippant.

Faucon-de-Nuit apparut subitement à un centimètre à peine de Zachary, ce qui eut pour effet de faire sursauter le blond sous la surprise. Tiara ne prit pas la peine de cacher son hilarité cette fois-ci et se mit à rire doucement en nouant son haut.

— Tu l'as vu arriver, réussit à dire Tiara après s'être un peu calmée.

Zachary attrapa sa veste et la fit glisser sur ses épaules.

— Ouais, ouais… alors où allons-nous ce soir, Sergent Garcia ?

— Nous, non, dit Faucon-de-Nuit d'une voix dénuée d'émotion. Tiara et moi allons retrouver Craven seuls.

— Pourquoi seuls ? releva Tiara en glissant ses pieds dans ses chaussures.

— Il désire t'apprendre quelque chose de nouveau, répondit Faucon-de-Nuit en prenant le bras de Tiara.

Tiara écarquilla les yeux et ne resta d'elle que l'écho de son hoquet de surprise dans son sillage.

Dès qu'ils eurent disparu, Zachary sortit comme une furie de la chambre et se dirigea vers la porte d'entrée de la maison... pour la claquer pas très sereinement derrière lui.

— Allons-y, tempêta Zachary en arrivant en trombe vers Guy et Jason qui attendaient.

— Et Tiara ? s'enquit Guy en reposant les yeux sur la maison.

— Elle est partie, répondit Jason avant de suivre Zachary jusqu'à la voiture.

Zachary le foudroya du regard.

— Ce fichu Indien invisible, voyeur et harceleur de mes deux l'a emmenée à son entraînement spécial avec Craven et ne m'a pas dit où ils allaient. Alors il faut que tu réveilles ce satané anneau pour découvrir où elle a bien pu filer.

Jason se tourna vers Guy.

— Je m'assis à l'arrière avec toi. »

Chapitre 4

Madame Tully franchit les portes du Moon Dance et s'approcha immédiatement d'Envy, alors assise à une table près du bar. Elle fronça des sourcils en remarquant que Trevor et Devon se tenaient chacun à un bout du même bar.

« Bon, dit-elle en passant aussitôt aux choses sérieuses, et si tu me racontais ce qui s'est passé ?

— Je vais bien, insista Envy en agitant une main dédaigneuse. Je crois que j'étais trop excitée ou un truc du genre.

— Je vois, répondit Madame Tully en haussant un sourcil perplexe. J'en déduis que tu t'es donc déjà évanouie à de nombreuses reprises ?

Envy tourna un visage songeur vers la vieille dame, en décidant de ne même pas répondre. En vérité… elle ne s'était jamais évanouie par le passé.

Madame Tully désigna la porte latérale.

— À l'étage, maintenant.

Trevor se précipita pour leur ouvrir la porte. Il la maintint même ouverte, pour laisser Devon passer avant lui puis grogna quand ce dernier tenta de la refermer derrière lui. Arrachant la porte de la main de Devon, il le dépassa dans l'escalier avec un sourire narquois aux lèvres puis ouvrit une autre porte à l'intention d'Envy quand elle approcha de sa chambre.

Il parcourut la chambre du regard, puis le posa sur Devon.

— Tu voulais devenir un adolescent plus tard… pas vrai ?

Devon esquissa un sourire alors qu'ils se faisaient face. Lui et Envy avaient fait l'amour dans cette chambre à peine deux heures plus tôt et leurs odeurs mêlées planaient encore lourdement dans l'air… assez lourdement pour que Trevor comprenne le message.

Chad leva les yeux au ciel devant ces deux crétins avant de concentrer son attention sur Envy.

— Dis-moi comment tu t'es sentie juste avant de t'évanouir, ma chérie, s'enquit Madame Tully une fois qu'elle eut assise Envy sur le lit.

Envy soupira.

— Je me suis sentie juste un peu étourdie... c'était une sensation de vertige, mais rien de trop sérieux.

Madame Tully eut l'air inquiète.

— Ça, ce sera à moi d'en juger. Elle se tourna immédiatement vers les hommes qui se massaient sur le pas de la porte. Allez ouste... dehors, dehors, dehors.

— Chad peut-il rester ? lui demanda Envy tout bas.

Madame Tully considéra le jeune homme en question avant d'acquiescer.

— Le frère peut rester… les autres, vous sortez. »

Devon et Trevor marmonnèrent tous deux dans leur barbe tandis que Madame Tully les poussaient vers la porte et refermait bruyamment la porte derrière eux.

« On peut savoir ce que tu lui as fait ? lança Trevor dans un sifflement rauque. Elle ne s'est jamais évanouie comme ça depuis que je la connais.

Devon lui adressa un regard noir.

— Si je connaissais déjà la raison de son évanouissement, je n'aurais pas approuvé ton idée d'appeler Madame Tully.

— Tu dois mieux t'occuper d'elle, grogna Trevor. Elle est humaine et je parie que tu la traites comme une métamorphe.

Effectivement, Devon se sentait un peu coupable concernant le manque de sommeil chez Envy de ces derniers temps, mais il croyait alors avoir résolu ce problème la semaine précédente.

— Tu n'étais pas là, déclara Devon. Moi, j'étais avec elle tous les jours, donc je pense être mieux renseigné que toi sur le sujet de son bien-être.

— J'ai une mission à accomplir, gronda Trevor, et cela implique de garder les rues en sécurité pour les gens comme Envy pour aller sans inquiétude.

— Bien sûr, répliqua Devon d'une voix traînante, si vous le dites, monsieur le fonctionnaire.

La porte de la chambre s'ouvrit à toute volée pour révéler une Madame Tully irritée qui les gratifia du regard furieux que seule une mère ou une grand-mère pouvait lancer.

— Si vous ne vous taisez pas tous les deux, je vous renvoie en bas pour vous faire attendre mon diagnostic, menaça-t-elle avant de claquer de nouveau la porte avec humeur.

— D'accord, capitula Trevor d'une voix affaiblie en reculant devant la porte.

Devon se tourna vers Trevor.

— Tu crois que nous avons dépassé les bornes ?

— Je crois que nous devrions la fermer, murmura Trevor.

Devon ne put s'empêcher de hocher la tête pour marquer son approbation.

Dans la chambre, Envy attendait patiemment pendant que Madame Tully l'examinait d'un œil de praticienne. Elle devint inquiète cependant quand Madame Tully ne fit rien de plus que de lui poser une main sur le front.

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