Маленький принц / Le Petit Prince - Антуан де Сент-Экзюпери 3 стр.


IX

Je crois quil profita, pour son évasion, dune migration doiseaux sauvages. Au matin du départ il mit sa planète bien en ordre. Il ramona soigneusement ses volcans en activité[38]. Il possédait deux volcans en activité. Et cétait bien commode pour faire chauffer le petit déjeuner du matin. Il possédait aussi un volcan éteint. Mais, comme il disait, «On ne sait jamais!» Il ramona donc également le volcan éteint. Sils sont bien ramonés, les volcans brûlent doucement et régulièrement, sans éruptions. Les éruptions volcaniques sont comme des feux de cheminée. Évidemment sur notre terre nous sommes beaucoup trop petits pour ramoner nos volcans. Cest pourquoi ils nous causent des tas dennuis.

Le petit prince arracha aussi, avec un peu de mélancolie, les dernières pousses de baobabs. Il croyait ne plus jamais devoir revenir. Mais tous ces travaux familiers lui parurent, ce matin-là, extrêmement doux. Et, quand il arrosa une dernière fois la fleur, et se prépara à la mettre à labri sous son globe, il se découvrit lenvie de pleurer.

«Adieu», dit-il à la fleur.

Mais elle ne lui répondit pas.

«Adieu», répéta-t-il.

La fleur toussa. Mais ce nétait pas à cause de son rhume.

«Jai été sotte, lui dit-elle enfin. Je te demande pardon. Tâche dêtre heureux.»

Il fut surpris par labsence de reproches. Il restait là tout déconcerté, le globe en lair. Il ne comprenait pas cette douceur calme.

«Mais oui, je taime, lui dit la fleur. Tu nen a rien su, par ma faute. Cela na aucune importance. Mais tu as été aussi sot que moi. Tâche dêtre heureux Laisse ce globe tranquille. Je nen veux plus.

 Mais le vent

 Je ne suis pas si enrhumée que ça Lair frais de la nuit me fera du bien. Je suis une fleur.

 Mais les bêtes

 Il faut bien que je supporte deux ou trois chenilles si je veux connaître les papillons. Il paraît que cest tellement beau. Sinon qui me rendra visite? Tu seras loin, toi. Quant aux grosses bêtes, je ne crains rien. Jai mes griffes.»

Et elle montrait naïvement ses quatre épines. Puis elle ajouta:

«Ne traîne pas comme ça, cest agaçant. Tu as décidé de partir. Va t-en.»

Car elle ne voulait pas quil la vît pleurer[39]. Cétait une fleur tellement orgueilleuse

X

Il se trouvait dans la région des astéroïdes 325, 326, 327, 328, 329 et 330. Il commença donc par les visiter pour y chercher une occupation et pour sinstruire.

Le premier était habité par un roi. Le roi siégeait, habillé de pourpre et dhermine, sur un trône très simple et cependant majestueux.

«Ah! Voilà un sujet!» sécria le roi quand il aperçut le petit prince.

Et le petit prince se demanda:

«Comment peut-il me reconnaître puisquil ne ma encore jamais vu!»

Il ne savait pas que, pour les rois, le monde est très simplifié. Tous les hommes sont des sujets.

«Approche-toi que je te voie mieux», lui dit le roi qui était tout fier dêtre enfin roi pour quelquun.

Le petit prince chercha des yeux où sasseoir, mais la planète était tout encombrée par le magnifique manteau dhermine. Il resta donc debout, et, comme il était fatigué, il bâilla.

 Il est contraire à létiquette de bâiller en présence dun roi, lui dit le monarque. Je te linterdis.

 Je ne peux pas men empêcher, répondit le petit prince tout confus. Jai fait un long voyage et je nai pas dormi

 Alors, lui dit le roi, je tordonne de bâiller. Je nai vu personne bâiller depuis des années. Les bâillements sont pour moi des curiosités. Allons! bâille encore. Cest un ordre.

 Ça mintimide je ne peux plus fit le petit prince tout rougissant.

 Hum! Hum! répondit le roi. Alors je je tordonne tantôt de bâiller et tantôt de»

Il bredouillait un peu et paraissait vexé.

Car le roi tenait essentiellement à ce que son autorité fût respectée[40]. Il ne tolérait pas le désobéissance. Cétait un monarque absolu. Mais comme il était très bon, il donnait des ordres raisonnables.

«Si jordonnais, disait-il couramment, si jordonnais à un général de se changer en oiseau de mer, et si le général nobéissait pas, ce ne serait pas la faute du général. Ce serait ma faute.»

«Puis-je masseoir? senquit timidement le petit prince.

 Je tordonne de tasseoir», lui répondit le roi, qui ramena majestueusement un pan de son manteau dhermine.

Mais le petit prince sétonnait. La planète était minuscule. Sur quoi le roi pouvait-il bien régner?

«Sire, lui dit-il je vous demande pardon de vous interroger

 Je tordonne de minterroger, se hâta de dire le roi.

 Sire sur quoi régnez-vous?

 Sur tout, répondit le roi, avec une grande simplicité.

 Sur tout?»

Le roi dun geste discret désigna sa planète, les autres planètes et les étoiles.

«Sur tout ça? dit le petit prince.

 Sur tout ça», répondit le roi.

Car non seulement cétait un monarque absolu mais cétait un monarque universel.

«Et les étoiles vous obéissent?

 Bien sûr, lui dit le roi. Elles obéissent aussitôt. Je ne tolère pas lindiscipline.»

Un tel pouvoir émerveilla le petit prince. Sil lavait détenu lui-même, il aurait pu assister, non pas à quarante-quatre, mais à soixante-douze, ou même à cent, ou même à deux cents couchers de soleil dans la même journée, sans avoir jamais à tirer sa chaise! Et comme il se sentait un peu triste à cause du souvenir de sa petite planète abandonnée, il senhardit à solliciter une grâce du roi:

«Je voudrais voir un coucher de soleil Faites-moi plaisir Ordonnez au soleil de se coucher

 Si jordonnais à un général de voler dune fleur à lautre à la façon dun papillon, ou décrire une tragédie, ou de se changer en oiseau de mer, et si le général nexécutait pas lordre reçu, qui, de lui ou de moi, serait dans son tort?

 Ce serait vous, dit fermement le petit prince.

 Exact. Il faut exiger de chacun ce que chacun peut donner, reprit le roi. Lautorité repose dabord sur la raison. Si tu ordonnes à ton peuple daller se jeter à la mer, il fera la révolution. Jai le droit dexiger lobéissance parce que mes ordres sont raisonnables.

 Alors mon coucher de soleil? rappela le petit prince qui jamais noubliait une question une fois quil lavait posée.

 Ton coucher de soleil, tu lauras. Je lexigerai. Mais jattendrai, dans ma science du gouvernement, que les conditions soient favorables.

 Quand ça sera-t-il? sinforma le petit prince.

 Hem! Hem! lui répondit le roi, qui consulta dabord un gros calendrier, hem! hem! ce sera, vers vers ce sera ce soir vers sept heures quarante! Et tu verras comme je suis bien obéi.»

Le petit prince bâilla. Il regrettait son coucher de soleil manqué. Et puis il sennuyait déjà un peu:

«Je nai plus rien à faire ici, dit-il au roi. Je vais repartir!

 Ne pars pas, répondit le roi qui était si fier davoir un sujet. Ne pars pas, je te fais ministre!

 Ministre de quoi?

 De de la Justice!

 Mais il ny a personne à juger!

 On ne sait pas, lui dit le roi. Je nai pas fait encore le tour de mon royaume. Je suis très vieux, je nai pas de place pour un carrosse, et ça me fatigue de marcher.

 Ministre de quoi?

 De de la Justice!

 Mais il ny a personne à juger!

 On ne sait pas, lui dit le roi. Je nai pas fait encore le tour de mon royaume. Je suis très vieux, je nai pas de place pour un carrosse, et ça me fatigue de marcher.

 Oh! Mais jai déjà vu, dit le petit prince qui se pencha pour jeter encore un coup dœil sur lautre côté de la planète. Il ny a personne là-bas non plus

 Tu te jugeras donc toi-même, lui répondit le roi. Cest le plus difficile. Il est bien plus difficile de se juger soi-même que de juger autrui. Si tu réussis à bien te juger, cest que tu es un véritable sage.

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