LES REJETÉS
La Drôle dHistoire dUne Famille de Vampires Contemporaine
par
Owen Jones
traduit de langlais (Royaume-Uni) par
Julien Dross
Copyright Owen Jones, 21 janvier 2014
Le droit dont dispose Owen Jones dêtre identifié comme auteur de cette œuvre a été établi selon les sections 77 et 78 de la loi britannique de 1988 sur le droit d'auteur, les dessins, les modèles, et les brevets (CDPA - Copyright Designs and Patents Act 1988). Le droit moral de lauteur a également été établi.
Les personnages et événements décrits dans cette œuvre de fiction sont le produit de limagination de lauteur ou sont utilisés dans un cadre fictionnel. Certains endroits peuvent effectivement exister, mais lhistoire racontée est entièrement fictive.
Publié par Megan Publishing Services
Sur Kindle, CreateSpace, et Audible
Tous droits réservés.
B00HZ1GIH6
B07DQ934SJ
DÉDICACE
Je dédie ce livre à mes amis, Lord David Prosser et Murray Bromley, qui, en 2013, nous ont aidés, ma famille thaïlandaise et moi, plus quils ne le réaliseront jamais.
Le karma donnera à chacun son juste dû.
Vous pouvez me contacter via :
http://facebook.com/OwenInThailand
http://twitter.com/lekwilliams
owen@behind-the-smile.org
http://owencerijones.com
Abonnez-vous à notre newsletter pour obtenir des informations exclusives concernant les écrits et livres dOwen Jones
en fournissant votre adresse e-mail sur :
http://meganthemisconception.com
1 LE PROBLÈME DE MONSIEUR LEE
Monsieur Lee, aussi connu dans les environs sous le nom du Vieux Lee, se sentait bizarre depuis déjà plusieurs semaines, et tout le monde dans le coin le savait, la communauté locale étant petite et isolée. Il avait donc fini par décider daller consulter une médecin de la région une de lancien genre, et non une docteure en médecine moderne , qui linforma que sa température corporelle nétait pas normale car quelque chose affectait son sang.
La médecin en question était la Chamane locale, ainsi que la tante de Monsieur Lee, et elle nétait pas encore en mesure de dire avec certitude ce qui causait son problème. Elle lui promit cependant de le découvrir dans un délai denviron vingt-quatre heures sil lui laissait des échantillons à étudier et revenait la voir quand elle le convoquerait. Pour ce faire, la Chamane lui donna une touffe de mousse et une pierre.
Il sut immédiatement quoi faire, car il avait déjà dû le faire par le passé. Il urina donc sur la mousse et cracha sur la pierre après sêtre profondément raclé la gorge. Il lui rendit ensuite solennellement les objets, quelle lui prit avec précaution en sassurant de ne pas les toucher directement avec ses mains nues afin de ne pas les contaminer avant de les envelopper chacun dans de la feuille de bananier afin den préserver lhumidité aussi longtemps que possible.
« Donne-leur un jour pour pourrir et sécher, puis je les étudierai de près pour découvrir ce quest ton problème.
Merci, Tante Da. Pardon, Chamane Da. Jattendrai ta convocation et viendrai aussitôt que tu me le demanderas.
Ne pars pas tout de suite, mon garçon. Jai encore à faire avec toi. »
Da se saisit dun pot en terre cuite situé sur une étagère derrière elle. Elle en retira le bouchon, prit deux gorgées de son contenu, et cracha la dernière sur le Vieux Lee. Tandis quelle entamait une prière à ladresse de ses dieux, Monsieur Lee songea au fait quelle avait oublié sa propre « purification ». Il détestait se faire cracher dessus par qui que ce fût, mais par de vieilles dames aux dents gâtées encore plus particulièrement.
« Cette aspersion à lalcool et ma prière taideront jusquà ce que nous trouvions la solution exacte à tes soucis », lui assura-t-elle.
La Chamane se releva de la position du lotus quelle avait adoptée sur le sol de terre nue de son sanctuaire médical, passa un bras autour des épaules de son neveu, et laccompagna à lextérieur tout en commençant à se rouler une cigarette en chemin.
Une fois dehors, elle lalluma, tira longuement dessus, et sentit la fumée emplir ses poumons.
« Comment vont cette épouse que tu as et tes adorables enfants ?
Oh, ils vont bien, Tante Da, mais ils sinquiètent un peu pour ma santé. Cela fait un moment que je me sens un peu mal alors que je nai jamais été malade de ma vie, comme tu le sais bien.
En effet. Nous, les Lee, nous sommes bien résistants. Ton père, mon cher frère, serait encore en bonne forme aujourdhui, sil nétait pas mort de la grippe. Il était fort comme un buffle. Tu lui ressembles, mais lui ne sest jamais fait tirer dessus. Je pense que cest ce qui a fini par te rattraper ; cette balle de yankee. »
Monsieur Lee avait déjà vécu cette conversation des centaines dautres fois auparavant, mais il ne parvenait jamais à en ressortir gagnant, aussi se contenta-t-il dopiner du chef, remit un billet de cinquante bahts à sa tante, puis sen fut en direction de sa ferme, qui se trouvait à quelques centaines de mètres du village.
Il se sentait déjà mieux, aussi commença-t-il à marcher dun pas plus vif pour le prouver à quiconque le verrait.
Le Vieux Lee avait une confiance pleine et entière en sa vieille tante Da, à linstar de chaque membre de leur communauté ; un petit village denviron cinq-cents maisons et de quelques douzaines de fermes dans sa périphérie. Sa tante avait endossé le rôle de Chamane du village lorsquil nétait encore quun jeune garçon, et à peine une dizaine de personnes tout au plus se souvenaient de son prédécesseur. Le village navait jamais eu son propre docteur en médecine diplômé duniversité.
Cela ne voulait pas dire que les villageois navaient pas accès à un médecin, mais ceux-ci étaient rares dans la région. Le médecin établi de manière permanente le plus proche officiait « en ville », à soixante-quinze kilomètres de là, et aucun bus, taxi, ou train ne desservait les montagnes de lextrême Nord-Est de la Thaïlande où ils vivaient. En plus de cela, les docteurs, ça coûtait cher, tout comme les médicaments quils prescrivaient et dont tout le monde pensait quils devaient leur rapporter de grosses commissions. Il y avait bien aussi une clinique quelques villages plus loin, mais son seul personnel était une unique infirmière à plein temps et un médecin itinérant à mi-temps qui ny travaillait quun jour toutes les deux semaines.
Les villageois comme Monsieur Lee pensaient que ces médecins étaient bons pour les riches citadins, mais ne leur servaient, à eux, pas à grand-chose. Comment un fermier aurait-il pu séloigner une journée entière de son travail et commissionner quelquun qui aurait dû en faire de même pour le conduire en voiture jusquen ville voir un docteur ? Il fallait déjà trouver quelquun possédant une voiture pour commencer, bien que quelques vieilles camionnettes ou vieux tracteurs pussent être trouvés dans un rayon de dix kilomètres.
Non, se dit-il. Tout le monde trouvait que sa vieille tante suffisait amplement, et il ny faisait pas exception. En outre, elle navait jamais laissé qui que ce fût mourir avant son temps et encore moins tué quelquun ; tout le monde en aurait juré, à nen point douter. Tout le monde.
Monsieur Lee était très fier de sa tante, et ce nétait pas comme sil y avait eu une autre option à des kilomètres à la ronde, ou qui que ce fût dautre avec sa vaste expérience Vaste ? En vérité, personne ne connaissait son âge exact pas même elle-même , mais elle devait bien avoir quatre-vingt-dix ans à quelques jours près.
Ce fut sur ces pensées que Monsieur Lee atteignit sa cour dentrée. Il avait lintention de discuter de cette situation avec son épouse car, bien quil donnât lapparence dêtre le chef de famille en société, comme cela était habituel dans chaque autre famille thaïlandaise, ce nétait bien que cela une apparence. En réalité, chaque décision était prise par la famille entière ; du moins par ses adultes.
Cette journée allait sans doute se révéler mémorable, car les Lee navaient jamais connu aucune « crise » auparavant, et leurs deux enfants, qui nen étaient au demeurant plus, auraient également droit à la parole. Une page dhistoire allait être écrite, et Monsieur Lee en avait pleinement conscience.
« Meuh ! » appela-t-il. Cétait le surnom affectueux quil donnait à sa compagne depuis que leur premier-né lavait dit en essayant de dire « mère ». « Meuh, est-ce que tu es là ?
Oui, je suis derrière. »
Lee attendit quelques instants quelle sortît des toilettes, mais lair était chaud et renfermé à lintérieur, aussi ressortit-il dans la cour dentrée et sinstalla-t-il sur leur large table familiale, abritée sous un toit dherbe, où ils se réunissaient habituellement tous pour manger ou passer leur temps libre.
Le vrai prénom de Madame Lee était Wan, bien que son mari lappelât affectueusement Meuh depuis que leur aîné lavait involontairement surnommée ainsi alors quil était encore un bambin. Il était cependant le seul à le faire ; leurs enfants navaient pas gardé cette habitude. Elle était originaire du village de Baan Noi, tout comme Lee létait, mais sa famille navait jamais connu aucune autre région, tandis que celle de son époux avait émigré depuis la Chine deux générations plus tôt, mais dun village qui nétait toutefois pas si éloigné de celui-ci que cela.
Elle était ce quon pouvait appeler une femme typique de ces contrées. Plus jeune, elle avait été une très jolie fille, mais les filles navaient alors pas autant dopportunités quà ce jour et nétaient également pas encouragées à avoir de lambition. À vrai dire, cela était toujours plus ou moins la même chose pour sa fille, même vingt années plus tard. Madame Lee sétait contentée de chercher un mari au sortir de lécole et, lorsque Heng Lee avait demandé sa main et montré la dot quil proposait à ses parents, elle sétait dit quil était une aussi bonne prise que nimporte quel autre garçon du coin quelle aurait pu trouver. Elle navait eu aucun désir de séloigner de ses amis et autres relations pour sinstaller dans une grande ville et élargir ses possibilités. Elle avait même fini par éprouver de lamour envers Heng Lee dune certaine manière qui lui était propre, même si le feu de la passion était depuis longtemps éteint en elle, après une courte vie amoureuse. Elle était désormais plus une partenaire commerciale quune épouse au sein de laffaire familiale quils entretenaient pour leur survie mutuelle, ainsi que celle de leurs deux enfants.
Wan navait jamais cherché à avoir un amant, même si on lui avait fait des avances avant et après son mariage. À lépoque, cela lavait outrée, mais elle y repensait désormais avec une certaine tendresse. Lee avait été son premier et unique amant, et il allait sans doute demeurer son dernier, mais elle ne le regrettait pas.