Colligite Fragmenta - AAVV 22 стр.


Davie, Grace (2004): «Patterns of religion in Western Europe: An exceptional case», a The Blackwell Companion to Sociology of Religion [Richard K. Fenn, ed.], Oxford, Blackwell Publishing, pp. 264-278.

Díaz-Salazar, Rafael (1993): «La transición religiosa de los españoles», a Religión y sociedad en España [R. Díaz-Salazar i Salvador Giner, eds.], Madrid, CIS, pp. 93-174.

Estruch, Joan; Gómez, Joan; Griera, Maria del Mar; Iglesias, Agustí (2004): Les altres religions. Minories religioses a Catalunya, Barcelona, Ed. Mediterrània.

Griera, Maria del Mar (2006): «Recomposicions del protestantisme català: de la dictadura al tombant de segle», a Quaderns-e. Institut Català dAntropologia, nº 7 [en línia: <http://www.antropologia.cat/antiga/quaderns-e/07/Griera.htm>].

Hervieu-Léger, Danièle (2004): «Individualism, the validation of faith, and the social nature of religion in Modernity», a The Blackwell Companion to Sociology of Religion [Richard K. Fenn, ed.], Oxford, Blackwell Publishing, pp. 161-175.

INE (2011): Instituto Nacional de Estadística. Censos de Población y Padrón Municipal [en línia: setembre de 2011].

Notes:

iI. RELIGIONS DEL MÓN I PROPOSTES DIALÒGIQUES

Consell de redacció de la revista Esprit (París)

Le sujet de mon intervention a un grand avantage et un grand inconvénient. Lavantage, cest que je nai pas eu besoin de chercher une construction: elle est déjà là, en trois parties, comme dans une bonne dissertation classique. Mais je me permettrai de changer un peu lordre du titre, en traitant dabord «les religions avec», puis «les religions contre», et enfin «les religions après» la modernité. Mais mon sujet a aussi un grand inconvénient: il est immense, presque sans limites. Il me faut donc préciser ses frontières: je vais parler surtout du christianisme, et je retiendrai seulement ce qui me paraît pertinent dans notre sujet pour le judaïsme et lislam, ainsi que pour les religions de lAsie. Toutes les religions du monde ont un rapport complexe, et une histoire compliquée avec lOccident et avec la modernité, et dun autre côté, la civilisation occidentale, si on peut parler ainsi, et la modernité ont un rapport complexe, mais central avec le christianisme.

Chaque religion est un continent, au propre et au figuré. Mais ce quon appelle les temps modernes fait aussi lobjet de nombreuses discussions. Je me concentrerai sur un point: il y a une dialectique de la modernité, un conflit interne dans la raison moderne elle-même, dont, au XXe siècle, lEcole de Francfort en particulier a tenté de rendre compte. On pourrait exprimer ce conflit ainsi: à mesure quelle avance dans la conquête et la maîtrise de la nature et de lhistoire comme liberté, la raison moderne sest révélé aussi comme une raison instrumentale, une raison qui a aussi une face obscure de déraison, une raison finalement destructrice, et donc décevante par rapport à ses promesses. Le monde quelle crée avec la démocratie et les libertés politique, les avancées sociales en faveur de légalité et de la justice, la technologie qui transforme les conditions du vivre ensemble, le monde moderne donc crée de nouvelles aliénations, de nouvelles souffrances individuelles et sociales. Le socialisme na pas plus apporté lémancipation que le marché capitaliste. Par rapport au moment où Horkheimer, Adorno et leurs collègues de lEcole de Francfort écrivaient leurs analyses, des années 30 aux années 60, on peut dire, au moins selon une certaine vision des choses, que la globalisation, ou la mondialisation libérale, a encore accentué quantitativement et qualitativement la présence de ce que Marcuse avait appelé lHomme unidimensionnel.

Je ninsiste pas, il y aurait dautres analyses possibles de la réalité moderne contrastée. Par exemple, Max Weber déjà, à travers la célèbre image de la «cage dacier», évoquait la perte de sens et la perte de liberté qui frappe les individus modernes marqués par la séparation et la «rationalisation» des sphères de la vie moderne. Dautres analyses du moderne je pense par exemple au sociologue américain Christopher Lasch ont insisté les contradictions profondes de lindividualisme moderne ou post-moderne. Plus personne ne peut croire à un «progrès» linéaire, comme on le pensait au XIXe et encore au XXe siècle. Or, dans leur attitude face à la modernité, les grandes religions du monde qui sont aussi des civilisations (cest le rappel le plus important de la thèse de Huntington sur le «choc des civilisations») sont forcément influencées par la dialectique de lAufklärung. Elles peuvent en adopter, au moins dans des limites, le côté conquérant et sûr de lui, les «avancées» comme le prétendent les gens de progrès. Elles peuvent aussi rejeter cette modernité comme néfaste, destructrice pour les religions, certains estimant même que modernité et religions sont irréconciliables, et donc que la première doit être combattue par les secondes. Dans la troisième partie, je reprendrai avec plus de distance sociologique la question des «religions après la modernité».

1. LES RELIGIONS AVEC LA MODERNITÉ

Je fais allusion ici aux efforts des grandes religions pour être à la hauteur du monde, pour sy «adapter», selon les dires de certains. Comme vous le savez, à partir de lAufklärung et de la Révolution française, cest une histoire conflictuelle qui souvre dabord, à la fois au niveau intellectuel et pratique (et il y a lieu de distinguer fortement la confrontation intellectuelle et ladaptation pratique, appelée aussi «sécularisation»). De façon très schématique, on pourrait dire quau temps des Lumières et encore après, il ny a pas de dialogue possible: dun côté, les philosophes, dont beaucoup restent croyants, ne voient plus de salut dans les religions révélées et leurs Ecritures, qui apparaissent comme un fatras dinepties et un tissu dincohérences, de surcroît intolérantes; le personnage de Jésus, les dogmes sur le Christ lui-même ne leur parlent plus. Par rapport à la Raison universelle, toutes les révélations sont particulières, et à ce titre dangereuses quand elles prétendent régenter les consciences. LEglise catholique est en première ligne dans ces critiques, pour des raisons théologico-politiques évidentes, mais les Eglises de la Réforme ny échappent pas. Dautre part, ceux quon appelle les «Libertins» anticipent dès le XVIe siècle une attitude démancipation morale par rapport au rigorisme catholique et protestant. Lintolérance des Eglises, appuyée sur le pouvoir politique, accentue encore ce phénomène.

Ce nest quà la fin du XVIIIe siècle et au début du XIXe siècle quil y a une prise de conscience religieuse de la modernité. Le grand nom est Schleiermacher, mais on pourrait y ajouter Kant, Hegel et dautres, aussi les Romantiques finalement. La meilleure façon de comprendre la nouveauté de ces théologiens et philosophes consiste peut-être à dire ceci: ils posent la question du sens de lexistence dans la modernité, et de la traduction de la théologie voire de Dieu dans le langage de la modernité. Ceux quon appelle les «théologiens libéraux» du XIXe siècle ne font pas autre chose, dautant plus quils sont interrogés ou stimulés par la recherche historico-critique très provocante sur la Bible. Je passe ensuite sur la longue histoire, protestante et catholique, de résistance et de soumission, comme dit Dietrich Bonhoeffer, jusquau XXe siècle et même, pour lEglise catholique, jusquà la seconde partie du XXe siècle, avec laggiornamento et la réconciliation qua représenté le Concile Vatican II. Il faudrait parler ici non seulement de toutes les réflexions de théologie et de spiritualité qui ont dialogué implicitement ou explicitement avec la modernité, mais aussi de toutes les actions «sur le terrain», où les croyants chrétiens participent avec dautres hommes, agnostiques, non croyants ou athées déclarés, à la construction de la Cité terrestre.

Une partie de lhistoire du christianisme moderne est donc celle de la réconciliation et de la conciliation avec la modernité des Lumières, on pourrait presque dire: avec le premier moment de la dialectique de la modernité, avec ses espérances démesurées de maîtrise de la nature et de lhistoire. Je pourrais lexprimer avec lexpression du Père de Lubac: cest une discussion avec l«humanisme athée», à la fois intellectuel et pratique. Il est frappant, en tout cas pour le Français que je suis, de voir que presque simultanément, après la Seconde Guerre Mondiale, Jean Paul Sartre, Henri Lefebvre et Jacques Maritain ont élevé la prétention que lexistentialisme, le marxisme et le christianisme étaient un humanisme. Et cela veut dire dans le cas de Maritain il nétait pas le seul quil voulait élever le christianisme à la hauteur de lhumanisme non pas du XVIe siècle, mais du XXe siècle. On pourrait en dire autant de Teilhard de Chardin ou de Mounier. Dune certaine manière, Teilhard, même sil a été seulement accueilli au Concile Vatican II, symbolisa sinon la réconciliation, du moins le dialogue, avec les sciences de la nature moderne. Il essaie de construire une formulation théologique qui soit acceptable après une découverte particulièrement difficile à concilier avec la tradition chrétienne de la Création: celle de lévolution. De son côté, Emmanuel Mounier est le philosophe de lengagement chrétien dans le monde moderne: pour plusieurs générations de militants, en France et dans divers pays du monde, Mounier signifie que la chrétienté est finie et quil faut sengager dans la cité politique moderne qui nest plus chrétienne, où il y a du «désordre» mais où il y a aussi à construire. Nous avons limpression aujourdhui que Mounier a été trop sensible aux désordres de la démocratie bourgeoise, ou quil était plus sensible aux désordres quaux avantages de la démocratie, mais peu importe. Comme Unamuno finalement, Mounier pense quil y a une «agonie» au double sens dune fin du christianisme comme chrétienté, mais aussi un combat spirituel possible du chrétien pour rendre la Cité humaine plus ordonnée, plus juste. Ce faisant, il est peut-être moins attentif que les théologiens protestants, Karl Barth y compris, à la crise que représente la sécularisation, ou la culture sécularisée, pour le christianisme et la foi.

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