La Femme Parfaite - Блейк Пирс 6 стр.


Évidemment, il en connaissait les grandes lignes car elle avait discuté du projet avec lui pendant ses recherches. Cependant, par la suite, le Comité lui avait fait jurer de n'en rien révéler, pas même à son mari.

Cela lui avait semblé bizarre de cacher une si grande partie de sa vie à son conjoint mais on lui avait assuré que c'était nécessaire. De plus, même s'il lui avait posé des questions générales sur le déroulement de sa thèse, il n'avait vraiment pas insisté sur ce sujet. Quelques vagues réponses l'avaient satisfait et, à l'époque, cela avait beaucoup réconforté Jessie.

Pourtant, la veille, comme elle avait ressenti énormément d'enthousiasme pour ce qu'elle allait faire (visiter un asile psychiatrique pour tueurs), elle avait été prête à tout lui dire malgré l'interdiction et ses conséquences. Si leur dispute avait eu une conséquence positive, c'était qu'elle l'avait empêchée de tout lui dire et de mettre en danger leur avenir commun.

Cela dit, quelle sorte d'avenir est-ce si je ne peux pas partager mes secrets avec mon propre mari ? Et s'il semble oublier que je les garde ?

A cette idée, une petite vague de mélancolie la submergea. Elle essaya de l'écarter mais n'y parvint qu'à moitié.

Elle sursauta quand elle entendit sonner à la porte. Quand elle regarda sa montre, elle se rendit compte que qu'elle était assise au même endroit, perdue dans ses pensées moroses et les mains sur une caisse de déménagement encore fermée, depuis dix minutes.

Elle se leva et se rendit à la porte en essayant de se débarrasser de sa tristesse à chaque pas. Quand elle ouvrit la porte, elle vit Kimberly, sa voisine d'en face, qui se tenait devant elle avec un sourire réjouissant au visage. Jessie essaya de l'imiter.

“Bonjour, voisine”, dit Kimberly sur un ton enthousiaste. “Comment se passe le déballage ?”

“Lentement”, admit Jessie, “mais merci d'avoir demandé. Comment ça va ?”

“Je vais bien. En fait, j'ai invité quelques dames du quartier chez moi. On prend un café de mi-matinée et je me demandais si vous voudriez vous joindre à nous.”

“Bien sûr”, répondit Jessie, heureuse d'avoir trouvé une excuse pour sortir quelques minutes de la maison.

Elle prit ses clés, ferma la maison et partit avec Kimberly. Quand elles arrivèrent, quatre têtes se tournèrent dans leur direction. Aucun des visages ne parut familier à Jessie. Kimberly présenta tout le monde et emmena Jessie à la cafetière.

“Elles ne s'attendent pas à ce que vous vous souveniez de leur nom”, murmura-t-elle en leur versant deux tasses. “Détendez-vous. Elles ont toutes connu ça.”

“Ça me soulage”, avoua Jessie. “J'ai tant de choses qui se bousculent dans ma tête ces jours-ci que j'ai du mal à me souvenir de mon propre nom.”

“C'est tout à fait compréhensible”, dit Kimberly, “mais je devrais vous avertir que je leur ai dit que vous alliez devenir profileuse au FBI, donc, elles poseront peut-être quelques questions à ce sujet.”

“Oh, je ne travaille pas pour le FBI. Je n'ai même pas encore obtenu mon diplôme.”

“Croyez-moi, ça n'a aucune importance. Elles pensent toutes que vous êtes une vraie Clarice Starling. Il y en aura au moins trois qui vous parleront de tueurs en série.”

Kimberly était en-dessous de la réalité.

“Êtes-vous assise dans la même pièce que ces hommes ?” demanda une femme du nom de Caroline avec des cheveux si longs que certaines mèches lui atteignaient les fesses.

“Ça dépend des règles de l’établissement”, répondit Jessie, “mais je n'en ai interviewé aucun sans qu'une profileuse ou enquêtrice confirmée soit avec moi et dirige l'interrogatoire.”

“Est-ce que les tueurs en série sont aussi intelligents qu'ils le paraissent dans les films ?” demanda avec hésitation une femme timide du nom de Josette.

“Je n'en pas interrogé assez pour vous le dire avec certitude”, lui dit Jessie, “mais, si je me fie à la documentation et mon expérience personnelle, je dirais que non. La plupart de ces hommes, car ce sont presque toujours des hommes, ne sont pas plus intelligents que vous ou moi. Certains échappent longtemps à la justice parce que certaines enquêtes sont mal menées. Certains réussissent à ne pas se faire capturer parce qu'ils choisissent des victimes qui n'intéressent personne : des prostituées, des personnes sans domicile fixe. Il faut un certain temps pour remarquer la disparition de ces gens-là et, parfois, les meurtriers ont tout simplement de la chance. Quand j'obtiendrai mon diplôme, mon travail sera de m'assurer qu'ils aient moins de chance.”

Les femmes l'assaillirent poliment d'une volée de questions, apparemment peu intéressées par le fait qu'elle n'avait même pas encore son diplôme et qu'elle avait encore moins étudié un cas officiel de profilage.

“Donc, en fait, vous n'avez jamais résolu d'enquête ?” demanda une femme particulièrement curieuse du nom de Joanne.

“Pas encore. Dans les faits, je suis juste une étudiante. Ce sont les pros qui s'occupent des cas réels. En parlant de professionnels, qu'est-ce que vous faites ?” demanda-t-elle en espérant diriger l'attention vers quelqu'un d'autre.

“Autrefois, j'étais dans le marketing”, dit Joanne, “mais c'était avant la naissance de Troy. Il m'occupe beaucoup, ces jours-ci. C'est un travail à temps plein.”

“C'est sûr. Est-ce qu'il est en train de faire la sieste quelque part, maintenant ?” demanda Jessie en cherchant autour d'elle.

“Probablement”, dit Joanne, jetant un coup d’œil à sa montre, “mais il va bientôt se réveiller et avoir faim. Il est à la crèche.”

“Oh”, dit Jessie avant de formuler sa question suivante aussi délicatement que possible. “Je croyais que la plupart des enfants que l'on mettait en crèche avaient des mamans qui travaillaient.”

“Oui”, dit Joanne, que la question ne semblait pas avoir offensée, “mais ils sont si bons là-bas que je ne pouvais pas ne pas l'y inscrire. Il n'y va pas tous les jours mais, comme les mercredis sont difficiles, en général, je l'y emmène. Les mi-semaines sont difficiles, n'est-ce pas ?”

Avant que Jessie ait pu répondre, la porte du garage s'ouvrit et un homme costaud d'environ trente ans avec une tignasse rousse mal coiffée entra brusquement dans la pièce.

“Morgan !” s'exclama joyeusement Kimberly. “Que fais-tu à la maison ?”

“J'ai laissé mon rapport dans le bureau”, répondit-il. “Ma présentation est dans vingt minutes. Donc, je ne pourrai pas rester longtemps.”

Morgan, qui semblait être le mari de Kimberly, n'avait pas du tout l'air étonné de voir une demi-douzaine de femmes dans son salon. Il traversa rapidement le groupe qu'elles formaient en leur offrant des salutations collectives. Joanne se pencha vers Jessie.

“Il est plus ou moins ingénieur”, dit-elle à voix basse comme si c'était une sorte de secret.

“Chez qui ? Un des entrepreneurs de la défense ?” demanda Jessie.

“Non, pour un groupe d'agences immobilières.”

Jessie ne comprenait pas pourquoi cela méritait une telle discrétion mais décida ne pas le demander. Quelques moments plus tard, Morgan réapparut dans le salon, aussi pressé qu'avant, avec une rame de papier en main.

“Content de vous voir, mesdames”, dit-il. “Désolé mais je ne peux pas rester. Kim, n'oublie pas que j'ai une réunion au club ce soir et que je rentrerai tard.”

“OK, mon amour”, dit sa femme en le poursuivant pour l'embrasser, après quoi il ressortit hâtivement par la porte.

Quand il fut parti, Kimberly retourna au salon, encore émue par cette visite inattendue.

“Il se déplace avec tant de détermination qu'on croirait que c'est lui qui est profileur criminel ou quelque chose de ce genre.”

Le commentaire fit éclater de rire le groupe entier. Jessie sourit mais elle ne comprenait pas exactement ce qui était si drôle.

*

Une heure plus tard, elle était de retour dans son propre salon et essayait de trouver assez d'énergie pour ouvrir la caisse qui se trouvait devant elle. Tout en coupant prudemment le ruban adhésif, elle repensa à la pause café. Il y avait quelque chose qui lui semblait bizarre mais elle ne voyait pas vraiment quoi.

Kimberly était adorable. Jessie l'aimait vraiment et appréciait surtout les efforts qu'elle déployait pour l'accueillir dans le quartier. Quant aux autres femmes, elles étaient toutes gentilles et avenantes, bien qu'un peu fades. Cependant, leurs interactions avaient quelque chose de … mystérieux, comme si elles partageaient toutes une sorte de secret dont Jessie était exclue.

Une partie d'elle-même pensait qu'elle était paranoïaque de soupçonner une telle chose. Ce n'était pas la première fois qu'elle tirait de fausses conclusions. Cela dit, tous ses instructeurs du programme de Psychologie Légiste de l'Université de Californie du Sud l'avaient complimentée pour son intuition. Ils ne semblaient pas penser qu'elle était paranoïaque, mais plutôt “d'une curiosité soupçonneuse”, comme un professeur avait dit d'elle. A l'époque, Jessie avait pris cette remarque comme un compliment.

Elle ouvrit la caisse et sortit le premier objet, une photo encadrée de son mariage. Pendant un moment, elle regarda fixement les expressions de bonheur qu'ils avaient au visage. Des deux côtés d'eux se tenaient des membres de leurs familles, qui souriaient tous eux aussi.

Elle laissa son regard dériver sur le groupe puis sentit soudain la mélancolie qu'elle avait ressentie plus tôt remonter en elle. L'anxiété lui crispa la poitrine. Elle se souvint qu'il fallait qu'elle inspire profondément mais ni l'inspiration ni l'expiration ne la calmèrent malgré le nombre de tentatives qu'elle fit.

Elle n'était pas vraiment sûre de ce qui l'avait mise dans cet état : les souvenirs, son nouvel environnement, la dispute avec Kyle, un mélange de tout ça ? Quoi que ce soit, elle reconnaissait une vérité fondamentale. Elle n'était plus capable de contrôler sa mélancolie toute seule. Elle avait besoin de parler à quelqu'un et, malgré la sensation aiguë d'échec qui se mit à la submerger pendant qu'elle tendait la main vers le téléphone, elle composa le numéro qu'elle avait espéré ne plus jamais avoir à utiliser.

CHAPITRE SEPT

Elle prit un rendez-vous avec son ancien thérapeute, le Dr Janice Lemmon, et rien que savoir qu'elle allait devoir se retrouver en terrain connu la réconforta. Quand elle avait réservé la séance, la panique avait disparu presque immédiatement.

Quand Kyle rentra tôt ce soir, ils commandèrent des plats à emporter et regardèrent un film kitsch mais amusant sur les mondes parallèles intitulé Passé Virtuel. Même si ni l'un ni l'autre ne s'excusa formellement, ils avaient l'air d'avoir redécouvert leur zone de confort. Après le film, ils ne montèrent même pas à l'étage pour faire l'amour. Au lieu de cela, Kyle se contenta de lui monter dessus là où ils étaient, sur le sofa. Cela rappela à Jessie les premiers jours de leur vie de couple.

Au matin, il lui avait même préparé le petit déjeuner avant d'aller travailler. Le résultat était affreux (les toasts étaient brûlés, les œufs coulaient et le bacon de dinde n'était pas assez cuit) mais Jessie avait apprécié qu'il essaye. Elle se reprochait un peu de ne pas lui avoir dit ce qu'elle allait faire de sa journée mais, une fois de plus, comme il n'avait rien demandé, ce n'était pas vraiment du mensonge.

Ce ne fut que lorsqu'elle se retrouva sur l'autoroute le lendemain et qu'elle aperçut les gratte-ciel du centre de Los Angeles que Jessie sentit vraiment se calmer l'anxiété qui lui dévorait l'estomac. Elle avait fait le trajet depuis le comté d'Orange en moins d'une heure et elle était arrivée en ville en avance pour avoir le temps de se promener un peu. Elle se gara dans le parking qui se trouvait près du bureau du Dr Lemmon, en face d'Original Pantry au coin de Figueroa et de West 9th.

Alors, elle eut l'idée d'appeler Lacey Cartwright, son ex-colocataire de l'Université de Californie du Sud, qui était aussi sa plus ancienne amie d'université et qui habitait et travaillait dans ce quartier, pour voir si elle pouvait venir se promener avec elle. Elle eut sa messagerie et laissa un message. Alors que Jessie commençait à descendre Figueroa dans la direction de l'Hôtel Bonaventure, Lacey lui envoya un SMS pour lui dire qu'elle était trop occupée pour sortir se promener mais qu'elles se retrouveraient la prochaine fois que Jessie serait dans le coin.

Qui sait quand ce sera ?

Jessie évita de penser à sa déception et se concentra sur la ville qui l'entourait, absorbant les vues et les sons pleins d'animation qui étaient si différents de son nouveau cadre de vie. Quand elle arriva dans la 5ème Rue, elle tourna à droite et continua à se promener.

Cela lui rappelait les jours, pas si anciens que cela, où elle avait fait ce genre de chose plusieurs fois par semaine. Si elle avait du mal avec une étude de cas qu'il fallait qu'elle rende, il lui suffisait de sortir dans les rues et d'utiliser le trafic comme bruit de fond pendant qu'elle tournait et retournait le cas dans sa tête jusqu'à ce qu'elle trouve une approche. Le meilleur travail qu'elle produisait était presque toujours le fruit d'une promenade dans le centre-ville de ce type assortie d'une réflexion simultanée.

Évitant de penser à la discussion qu'elle allait avoir avec le Dr Lemmon, elle repensa à la pause-café à laquelle elle avait participé la veille chez Kimberly. Elle n'arrivait toujours pas à comprendre la nature de cette mystérieuse culture du secret qui sévissait chez les femmes qu'elle avait rencontrées là-bas. Cependant, rétrospectivement, une chose lui parut soudain évidente : elles avaient toutes beaucoup voulu que Jessie leur décrive en détail ses études de profileuse.

Elle ne savait pas si c'était parce que la profession qu'elle allait exercer avait l'air si inhabituelle ou simplement parce que c'était une profession. Quand elle y repensa, elle se rendit compte qu'aucune de ces femmes ne travaillait.

Certaines avaient déjà travaillé. Joanne avait été dans le marketing. Kimberly avait dit qu'elle avait été agente immobilière quand elle avait vécu à Sherman Oaks. Josette avait été à la tête d'une petite galerie à Silverlake. Toutefois, maintenant, elles étaient toutes mères au foyer et, bien qu'elles semblent heureuses de leur nouvelle vie, elles avaient aussi l'air de regretter le monde du travail car elles dévoraient avidement et d'un air presque coupable la moindre intrigue dont elles pouvaient entendre parler.

Jessie s'arrêta et se rendit compte que, d'une façon ou d'une autre, elle était arrivée au Biltmore Hotel. Elle y était déjà venue très souvent. Il était célèbre, entre autres choses, pour avoir accueilli une première version des Oscars dans les années 1930. Un jour, on lui avait également dit que c'était l'endroit où Robert Kennedy avait été assassiné par Sirhan Sirhan en 1968.

Avant qu'elle avait décidé de faire sa thèse sur la DNR, Jessie avait envisagé de profiler Sirhan. Donc, un jour, elle était arrivée à l'improviste et avait demandé au concierge s'il organisait des visites de l'hôtel qui montraient le site de l’assassinat. Le concierge avait été perplexe. Il lui avait fallu quelques moments embarrassants pour comprendre ce que Jessie recherchait et plusieurs autres pour lui expliquer poliment que l'assassinat ne s'était pas produit là mais à l'Hôtel Ambassador, qui avait été démoli depuis. Il avait essayé de la réconforter en lui révélant que JFK avait reçu sa nomination à la présidence par le Parti Démocrate au Biltmore en 1960 mais Jessie s'était sentie trop humiliée pour rester écouter cette histoire.

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