Salle de Crise - Джек Марс 7 стр.


Luke montra d’un geste la pièce où ils se trouvaient. « Et ça, ce sont les circonstances idéales. »

Swann le regarda droit dans les yeux. « Luke… »

Luke leva la main. « Swann. Sors, s’il te plait, » dit-il, en lui montrant la porte derrière lui.

Swann secoua la tête. Son visage était maintenant tout rouge. On aurait dit qu’il était sur le point de se mettre à trembler. « Pourquoi est-ce que tu m’as demandé de t’accompagner pour cette mission ? » dit-il. « Je ne travaille plus pour le FBI, et toi non plus. »

Luke faillit sourire. Il ne savait pas exactement ce que pensait Swann, mais ce qu’il lui disait était exactement ce dont il avait besoin. C’était le script idéal du bon flic, mauvais flic.

« J’ai besoin de tes compétences, » dit Luke. « Mais pas pour ça. Alors s’il te plaît, va faire un tour. Et tu remarqueras que je suis resté très poli jusqu’à présent. Mais je vais finir par perdre patience. »

« Je déposerai officiellement plainte, » dit Swann.

« Vas-y, je t’en prie. Tu sais pour qui je travaille. Ta plainte finira à la poubelle. Mais fais-toi plaisir, ne serait-ce que pour avoir la satisfaction d’avoir essayé. »

« J’ai bien l’intention de le faire, » dit Swann. Sur ces mots, il sortit de la pièce en refermant la porte derrière lui, mais sans la claquer.

Luke soupira. Il regarda Ed. « Ed, est-ce que tu pourrais remplir ces arrosoirs à l’évier de la cuisine ? On va en avoir besoin dans une minute. »

Ed lui sourit d’un air enchanté. « Avec plaisir. »

En prenant les arrosoirs, Ed regarda Li d’un air à moitié fou. C’était une expression qui donnait la chair de poule… même à Luke. On aurait dit qu’il était devenu taré, un sadique qui prenait du plaisir à torturer les gens. Luke ne savait pas d’où il tenait cette expression ou ce qu’elle signifiait. Et il n’avait pas vraiment envie de le savoir.

« Mon frère, » dit Ed à Li. « Ta journée est loin d’être terminée. »

Pendant qu’Ed se trouvait dans la petite cuisine de la cabane, Luke regarda attentivement Li. Il tremblait de tout son corps, comme s’il était traversé par un courant électrique. Il avait les yeux écarquillés et il avait l’air terrifié.

« Tu as déjà assisté à ce genre de séance, n’est-ce pas ? » dit Luke.

Li hocha la tête. « Oui. »

« Sur des prisonniers ? »

« Oui. »

« C’est horrible, » dit Luke. « Vraiment horrible. Personne ne tient le coup. »

« Je sais, » dit Li.

Luke regarda en direction de la cuisine. Ed prenait son temps. « Et Ed… il faut que tu saches qu’il prend vraiment du plaisir à faire ça. »

Li resta silencieux, mais son visage devint de plus en plus rouge. On aurait dit qu’il y avait une véritable explosion en lui et qu’il essayait de la contrôler. Il ferma les yeux et serra les dents. Son corps tout entier se mit à trembler.

« J’ai froid, » dit-il. « Vous ne pouvez pas me faire ça. »

Luke comprit soudain quelque chose.

« Ils t’ont fait passer par là, » dit-il. « Ton pays. » Ce n’était pas une question. Il en était sûr et certain. Li avait déjà été torturé auparavant et c’était certainement le gouvernement chinois qui l’avait fait.

La bouche de Li s’ouvrit comme s’il allait hurler. Mais aucun son ne sortit de sa bouche. On aurait dit un loup-garou qui hurle d’agonie au moment où son corps d’homme se transforme en loup. Mais aucun son ne sortait de sa bouche, à part un bruit étouffé au fond de sa gorge.

Tout son corps était raide et ses muscles étaient tendus, comme si le courant électrique qui le traversait avait augmenté d’intensité.

« Tu étais un traître, » dit Luke. « Un ennemi de l’état. Mais tu as été réhabilité en prison. Et la torture faisait partie du processus. Ils t’ont transformé en agent, mais pas en quelqu’un d’important. Tu es devenu l’un de ces agents remplaçables. C’est pour ça que tu étais sur le terrain et que tu avais des pilules de cyanure. Si tu te faisais avoir, tu étais supposé mettre fin à tes jours. Et c’était d’ailleurs impossible que tu ne te fasses pas attraper, n’est-ce pas ? Mais tu n’as pas eu le courage de te tuer et maintenant, nous sommes le seul espoir qui te reste. »

« S’il vous plaît ! » hurla Li. « S’il vous plaît, ne me torturez pas ! »

Son corps se mit à trembler de manière incontrôlable. Et une odeur commença à émaner de lui, l’odeur épaisse et humide d’excréments.

« Oh mon dieu, » dit-il. « Oh mon dieu. Aidez-moi. Aidez-moi. »

« Qu’est-ce qui se passe ici ? » dit Ed, en revenant avec les arrosoirs. Il fit la grimace en sentant l’odeur. « Oh, merde. »

Luke fronça les sourcils. Il ressentit presque de la pitié pour cet homme. Puis il repensa à tous ces morts et à toutes ces personnes qui avaient perdu leur maison. Il n’y avait rien, aucune expérience négative, qui pouvait justifier ça.

« Oui, Li n’a pas pu se retenir, » dit-il. « Il est traumatisé. Apparemment, ce n’est pas la première fois qu’on le torture en le noyant. »

Ed hocha la tête. « Tant mieux. Comme ça, tu sais déjà ce qui t’attend. » Il baissa les yeux vers Li. « Mais on ne va pas s’arrêter là, tu sais ? On n’en a rien à foutre de l’odeur, alors si c’était le but, c’est raté. » Ed regarda Luke. « J’ai déjà vu faire ça, ils se chient dessus en pensant que l’odeur sera tellement insoutenable qu’on s’arrêtera là. Ou peut-être qu’on aura pitié d’eux. Peu importe. » Il secoua la tête. « Ça pue mais ça ne marchera pas. On ne serait pas là si on était du genre sensible, Li. J’ai déjà senti l’odeur de tripes. Alors crois-moi, c’est pire que tout ce qui peut te sortir de l’intestin. »

« S’il vous plaît, » dit à nouveau Li. Il parlait à voix basse, presque en murmurant. Son corps tremblait. Il baissa la tête et regarda le sol. « S’il vous plaît, ne me torturez pas. Je ne le supporterais pas. »

« Donne-moi quelque chose, » dit Luke. « Donne-moi une info et on verra. Regarde-moi, Li. »

Li baissa encore plus la tête. Il la secoua. « Je ne peux pas vous regarder. » Il grimaça, sous l’effet de l’humiliation. Puis il se mit à pleurer.

« Aidez-moi. S’il vous plaît, aidez-moi. »

« Tu ferais mieux de nous dire quelque chose, » dit Luke. « Ou on va se mettre au travail. »

Luke recula de trois mètres et le regarda. Li était affaissé sur sa chaise, la tête penchée en avant, les bras attachés derrière le dos, le corps tremblant. On aurait dit que chaque partie de son corps réagissait de manière indépendante. Il n’y avait aucune coordination. Luke remarqua que l’entrejambe de Li était humide. Il s’était également pissé dessus.

Luke prit une profonde inspiration. Ils allaient devoir demander à quelqu’un de venir le nettoyer.

« Li ? » dit-il.

Li regardait toujours le sol. Il se mit à parler, mais sa voix semblait venir d’outre-tombe. « Il y a un entrepôt. Un petit entrepôt, avec un bureau. Un importateur d’objets chinois. Dans le bureau, tout est expliqué. »

« C’est le bureau de qui ? » demanda Luke.

« Le mien. »

« C’est une façade ? » demanda Ed.

Li essaya de hausser les épaules, mais son corps ne cessait de trembler. « Plus ou moins. Il fallait tout de même que ce soit opérationnel, sinon ça ne pouvait pas servir de couverture. »

« Où se trouve ce bureau ? »

Li murmura quelque chose.

« Quoi ? » demanda Luke. « Je ne t’ai pas entendu. Si tu me fais perdre mon temps, on va passer à la manière dure. Tu crois qu’Ed n’a plus envie de jouer avec toi ? Alors réfléchis bien. »

« Il se trouve à Atlanta, » dit Li, sur un ton qui trahissait le soulagement. « L’entrepôt est à Atlanta. C’est là que j’étais basé. »

Luke sourit.

« OK, donne-nous l’adresse. On reviendra dans quelques heures. » Il posa sa main sur l’épaule de Li. « Et que dieu te vienne en aide s’il s’avère que tu nous as menti. »

*

« C’était du bon boulot, Swann, » dit Luke. « Même si j’avais écrit le script moi-même, je n’aurais pas pu faire mieux. »

« Je ne vous ai jamais dit que je jouais au théâtre à l’école ? »

« Eh bien, tu as raté ta vocation, » dit Luke. « Tu aurais pu travailler à Hollywood, avec ce dont tu es capable. »

Ils traversèrent le trottoir en direction du SUV noir qui les attendait. Deux hommes en combinaison FEMA venaient juste d’en sortir et se dirigeaient vers la cabane. Luke regarda autour de lui. Il n’y avait que des clôtures et des fils barbelés. Derrière la tour de guet la plus proche, une colline escarpée se dressait vers les montagnes de Géorgie.

Swann sourit. « J’ai essayé d’y mettre une touche crédible d’indignation. »

« En tout cas, je t’ai cru, » dit Ed.

« Mais au fond, je n’ai pas vraiment eu besoin de jouer la comédie. Je ne suis pas du tout un fan de la torture. »

« Nous non plus, » dit Ed. « En tout cas, pas tout le temps. »

« Est-ce que vous avez fini par le faire ? » demanda Swann.

Luke sourit. « Qu’est-ce que tu penses ? »

Swann secoua la tête. « J’étais parti depuis seulement dix minutes quand vous êtes sortis de la cabane, alors je pense que vous ne l’avez pas fait. »

Ed lui donna une tape dans le dos. « Vas-y, continue à te poser la question, l’analyste. »

« Alors, vous l’avez fait ou pas ? » demanda Swann.

Quelques minutes plus tard, ils se retrouvaient dans l’hélico qui s’élevait au-dessus de la forêt dense, en direction d’Atlanta.

CHAPITRE SIX

10h05

Observatoire Naval des États-Unis – Washington DC

« Monsieur le député, merci d’être venu. »

Susan tendit la main pour serrer celle de l’homme de grande taille en costume bleu foncé qui se trouvait devant elle. C’était le représentant de l’Ohio, Michael Parowski. Il avait des cheveux blancs précoces et de petits yeux plissés bleu pâle. Il avait cinquante-cinq ans et c’était un homme beau et solide, dans le sens un peu sauvage du terme. Né et élevé dans une famille d’ouvriers, il avait de grandes mains solides et les larges épaules d’un homme qui avait commencé sa carrière en tant que ferronnier.

Susan connaissait son histoire. C’était un célibataire endurci. Il avait grandi à Akron et il était le fils d’immigrés polonais. Quand il était adolescent, il était boxeur amateur. Les cités industrielles du Nord, Youngstown, Akron et Cleveland, étaient son bastion. Le soutien qu’il avait là-bas était inébranlable. C’était presque devenu une légende, un mythe. Il en était à son neuvième mandat au sein du congrès et ses réélections avaient chaque fois été une formalité.

Est-ce que Michael Parowski allait être réélu dans le Nord de l’Ohio ? Est-ce que le soleil se lèverait demain ? Est-ce que la Terre continuerait à tourner sur son axe ? Si je laissais tomber un œuf, est-ce qu’il allait s’écraser sur le sol de la cuisine ? Michael Parowski était devenu aussi incontournable que les lois de la physique.

Susan l’avait vu sur des vidéos faisant des bains de foule lors de manifestations syndicales, de fêtes ou au cours de festivals ethniques (où il ne discriminait personne – Polonais, Grecs, Portoricains, Italiens, Afro-américains, Irlandais, Mexicains, Vietnamiens – si vous aviez une origine ethnique, Michael Parowski était votre homme). Il serrait les mains de tout le monde, donnait de grandes tapes dans le dos, saluait des deux mains et serrait les gens dans ses bras. On le voyait souvent murmurer quelque chose à l’oreille des dames, c’était typique de lui.

En plein milieu de la foule et du chaos, avec des dizaines ou même des centaines de personnes se pressant contre lui, il prenait immanquablement une vieille dame à part et lui murmurait quelque chose à l’oreille. Il arrivait parfois que les femmes rient, rougissent ou qu’elles agitent leur doigt d’un air réprobateur. La foule adorait ces moments et aucune des femmes n’a jamais répété ce qu’il lui avait dit. C’était une vraie mise en scène politique de haut niveau. Le genre de mise en scène que Susan adorait.

Ici, à Washington, c’était un syndicaliste convaincu. Au Capitole, il était l’un des plus grands défenseurs de la condition ouvrière. Il était plus hésitant sur certains autres sujets qui tenaient à cœur à Susan, comme le droit des femmes et des homosexuels, ou la protection de l’environnement. Mais pas au point qu’ils ne puissent pas s’entendre. En fait, dans un sens, ses points forts venaient compléter ceux de Susan. Elle pouvait parler de manière passionnée au sujet de la pureté de l’air ou de la santé des femmes, et il pouvait l’égaler en passion quand il parlait de la détresse du travailleur américain.

Mais même ainsi, Susan n’était pas sûre qu’il soit la personne idéale, bien que les aînés du parti lui aient assuré le contraire. Ils voulaient vraiment que ce soit lui. Pour dire vrai, ils avaient pratiquement pris la décision pour elle. Et ce qu’ils voulaient de lui, en plus de sa popularité, c’était sa ténacité. Il était l’image même de la solidité. Il ne buvait pas, il ne fumait pas et on avait l’impression qu’il ne dormait pas beaucoup. Il passait sa vie en avion et faisait continuellement des aller-retours entre Washington et son district. On pouvait le voir à des réunions de comité ou à des votes au Capitole à des heures tardives, et six heures plus tard, le retrouver dans un cimetière de Youngstown, frais et dispos, les larmes aux yeux, entourant de ses bras la mère d’un mécanicien qui venait de mourir tragiquement.

Bien que ses ennemis affirment qu’il soit resté ami avec certains truands, avec lesquels il avait grandi dans son quartier… eh bien, ça ne faisait qu’en ajouter à son image. C’était un homme doux mais dur, loyal mais pas quelqu’un à qui il fallait chercher des noises.

Il lui décocha un large sourire. « Madame la Présidente, que me vaut l’honneur ? »

« S’il te plaît, Michael. Continue à m’appeler Susan. »

« OK, Susan. »

Elle le mena jusqu’à son cabinet privé. Déjà en tant que Vice-Présidente, elle avait très vite cessé d’organiser les réunions importantes dans son bureau. Elle préférait l’ambiance informelle de son cabinet privé. Quand ils entrèrent, Kat Lopez les y attendait.

« Est-ce que vous connaissez ma chef de cabinet, Kat Lopez ? »

« Je n’ai pas encore eu ce plaisir. »

Ils se serrèrent la main. Kat lui sourit, ce qui était assez rare chez elle. « Monsieur le député, je suis l’une de vos plus grandes fans depuis le collège. »

« Ça ne doit pas remonter à très longtemps, alors. »

Kat eut alors une réaction plutôt inattendue chez elle. Elle se mit à rougir. Ce fut très bref et elle se reprit immédiatement, mais il était clair que cet homme faisait de l’effet aux gens.

Susan fit un geste à Parowski, en disant : « Viens, asseyons-nous. »

Parowski s’assit dans l’un des confortables fauteuils. Susan s’assit en face de lui et Kat resta debout derrière elle.

« Mike, on se connait depuis longtemps. Alors je ne vais pas tourner autour du pot. Comme tu le sais, je suis devenue Présidente du jour au lendemain, quand Thomas Hayes est mort. Ça m’a pris un peu de temps pour m’y faire. Et j’ai préféré attendre avant de choisir un Vice-Président. »

« J’ai entendu quelques rumeurs sur les événements d’hier, » dit Parowski.

Susan hocha la tête. « C’est vrai. Nous pensons qu’il s’agit d’une attaque terroriste. Mais nous la surmonterons, comme nous avons surmonté les autres, et nous continuerons à aller de l’avant. Et l’une des manières dont nous allons y parvenir, c’est avec un solide Vice-Président. »

Parowski la regarda dans les yeux.

Susan hocha la tête. « Toi. »

Il leva les yeux vers Kat Lopez, puis regarda à nouveau Susan. Il sourit, avant de se mettre à rire.

« Je pensais que tu allais me demander de récolter quelques votes pour toi au Capitole. »

« Oui, bien sûr, » dit-elle. « Je vais te demander de le faire. Mais en tant que Vice-Président et Président du Sénat, pas en tant que représentant de l’Ohio. »

Elle leva les mains au ciel. « Je sais… tu as sûrement l’impression que je te jette ça au visage sans prévenir, et c’est un peu le cas. Mais ça fait déjà quelque temps que je tâte le terrain et j’ai eu plusieurs réunions à ce sujet au cours des six dernières semaines. Et c’est à chaque fois ton nom qui revient. Tu jouis d’une énorme popularité dans ton district et tu attires une vaste majorité à travers tout le Nord des États-Unis, et même dans les districts des classes ouvrières du Sud. Et tu es aussi un candidat infatigable, qui pourra m’accompagner sur les routes quand le moment de faire campagne sera venu. »

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