Le Visage de la Peur - Блейк Пирс 6 стр.


« Pourquoi les criminels font-ils cela ? demanda-t-elle.

– Faire quoi ?

– Ils se montrent à nous. Ils rendent les choses plus faciles avec leurs tatouages de gang.

– Je ne pense pas que ce soit l’objectif de cette pratique, » dit Shelley, en lui faisant un sourire ironique par-dessus son épaule. « C’est le conformisme social. Montrer qu’on appartient à un groupe particulier. Parfois, la loyauté et la camaraderie indéfectibles qui découlent de ce sentiment d’appartenance l’emportent sur le besoin de se protéger ou sur la logique d’échapper à l’arrestation.

– Je ne me ferai jamais un tatouage de gang. Même si c’était une condition pour rejoindre le gang. En fait, surtout si tel était le cas. Quelle règle stupide. »

Shelley fit légèrement pivoter sa chaise, tout en regardant Zoe d’un air amusé. « Tu ne rejoindrais pas un gang de toute façon, n’est-ce pas ? Cela nécessiterait beaucoup de bavardages. Je ne pense pas que tu aimerais ça.

– Je ne me ferai tatouer sous aucun prétexte, quoi qu’il en soit » répondit Zoe, en rebondissant sur l’autre aspect du problème. « Je ne comprends pas pourquoi quelqu’un le ferait. Qu’est-ce qui pourrait être si important pour qu’il soit nécessaire de l’inscrire à l’encre sur le corps de manière permanente ?

– Tu n’aimes vraiment pas les tatouages, n’est-ce pas ? »

Zoe ne pouvait pas dire si Shelley se moquait d’elle ou non. « Ils sont une marque d’intelligence inférieure. Les délinquants sont statistiquement beaucoup plus susceptibles d’avoir des tatouages que les citoyens respectueux des lois. Et avec le temps qui passe, ils ont inévitablement l’air stupides. Pourquoi souris-tu comme ça ?

– Parce qu’il y a quelque chose que tu ne sais pas à mon sujet. » Shelley poussa sa chaise un peu en arrière de son bureau et posa son pied sur le siège. Avant que Zoe ait pu protester ou lui demander ce qu’elle était en train de faire, Shelley remonta l’ourlet de son pantalon pour révéler la peau nue du bas de sa jambe.

Un coquelicot miniature y était gravé, en rouge et noir brillants, presque assez réaliste pour que Zoe imagine pouvoir l’attraper et lui retirer ses pétales.

« Tu as un tatouage ? » dit Zoe, même si c’était une évidence. Le choc était trop grand. Elle n’aurait jamais imaginé que Shelley ait été quelqu’un qui souillerait son corps avec de l’encre.

« Il a bien tenu, je trouve, » dit Shelley. Elle souriait, et même si Zoe pensait que c’était peut-être de bon ton, elle n’en était pas si certaine. « Je l’ai fait faire quand j’étais à l’université. Ma grand-mère s’appelait Poppy. Après sa mort, j’ai pensé que ça pourrait être une bonne façon de se souvenir d’elle. »

Zoe retourna sur sa chaise et s’y enfonça. Elle se sentait désarçonnée. « En as-tu d’autres ?

– Non, rit Shelley. Celui-ci a fait un mal de chien. J’ai renoncé après ça.

– Je ne connaissais pas… cette partie de toi.

– Quelle partie ? La partie criminelle et peu intelligente ?

Zoe déglutit. Elle était probablement mal à l’aise face aux émotions humaines et aux normes sociales, mais elle savait ceci : elle devait s’excuser.

« Ce n’est pas ce que je voulais dire te concernant, dit-elle. Je ne savais pas que…

– Tu as élaboré une théorie, dit Shelley. Je sais que tu ne penses pas que je suis une mauvaise personne, donc tu dois déjà reconnaître que ton hypothèse n’était pas totalement juste. Il n’y a pas que les criminels et les idiots qui se font tatouer.

Zoe acquiesça, mesurant prudemment ses mots. « J’admets qu’un signe de respect en mémoire d’un être cher et disparu peut aussi être une raison valable pour s’engager dans une telle démarche.

– C’est au moins un progrès, » dit Shelley. Elle souriait à nouveau, et Zoe avait l’impression que c’était encore à ses dépens. Mais elle s’était trompée et avait dit quelque chose qui aurait pu être blessant, cela semblait donc justifié. « Comment avance ta recherche ? »

Zoe saisit l’allusion peu subtile et retourna à son écran, où les dossiers de police de Clay Jackson avaient enfin fini de se télécharger. Elle siffla doucement, secouant la tête devant la longueur des résultats qui étaient apparus. « Il a bien un casier. On dirait qu’il était membre d’un gang local, comme nous le suspections. »

C’était maintenant au tour de Shelley de se pencher par-dessus l’épaule de Zoe. Elles parcoururent ensemble les résultats. Ils ne racontaient pas une belle histoire.

Clay Jackson avait fait partie d’un gang de Los Angeles, une équipe de rue notoirement impliquée dans le trafic illégal de drogues, entre autres choses. Le genre de drogues auxquelles Callie avait touché. Il n’était pas difficile de deviner où elle avait pu s’approvisionner.

Les tatouages de Clay n’étaient que le début. Il avait été un pilier du gang, soupçonné d’avoir mené des attaques sur le territoire de ses rivaux et d’avoir été le cerveau à l’initiative de plusieurs affaires ayant permis de mettre le gang en rapport avec des fournisseurs et des acheteurs. Il avait fait l’objet de plusieurs avertissements, pour détention de drogue et d’armes, chacune ayant été suivie d’une arrestation en bonne et due forme, et de diverses sanctions. Il avait passé un certain temps en prison, entrant et sortant au bout de quelques mois à chaque fois, jamais pour des motifs suffisamment graves pour tomber pour de bon.

Jusqu’au jour où tout cela s’était terminé dans une ruelle, son corps laissé dans une mare de sang et découvert par la police, après que des coups de feu aient été signalés par les habitants du quartier. Il n’y eut jamais de preuve tangible quant à l’identité du coupable, seulement des liens circonstanciels et des soupçons, qui étaient facilement repérables dans le déroulé des interrogatoires et des arrestations qui suivirent le crime.

« Regarde ça, » fit remarquer Zoe en pointant du doigt son écran. « La seule accusation qu’ils ont réussi à faire tenir pendant toute l’enquête était la possession d’une arme à feu illégale. C’était l type qu’ils suspectaient de l’avoir fait, mais ils n’ont pas pu le prouver. C’est tout ce qu’ils ont pu obtenir de lui. Il en a pris pour cinq ans.

– Fais une recherche sur lui, dit Shelley. Quel est son nom ? Cesar Diaz ?

– C’est ça, » répondit Zoe, en attendant que la page s’actualise. « Son gang avait des liens étroits avec les cartels mexicains. Il paraîtrait qu’ils se seraient battus pour le territoire. Pour savoir qui avait le droit de vendre dans cette zone.

– Tout concorde. Si Clay était un gros bonnet dans son organisation, obtenant de nouvelles affaires et concluant de nouvelles ventes, alors leurs rivaux auraient voulu le mettre sur la touche en particulier. Et déclarer sans ambiguïté qui sont les maîtres. »

L’information au sujet de César Diaz clignota sur l’écran.

Elles lurent ensemble la dernière mise à jour, puis marquèrent une pause et se regardèrent l’une l’autre.

C’était énorme.

« Cesar Diaz a été libéré sur parole il y a quelques mois, » dit Shelley, à voix haute.

« César Diaz est dans les rues, et cherche peut-être à se venger. Ça expliquerait pour Callie. Faire disparaître les choses auxquelles Clay tenait, pour annoncer son retour avec retentissement, montrer qu’il ne s’est pas adouci. Qu’il est toujours aux commandes.

– Mais qu’en est-il de John Dowling ? Cela n’a toujours pas de sens pour moi. » Shelley fronça les sourcils. « Y a-t-il un lien entre John et Cesar ? »

Zoe parcourut la page, à la recherche de tout ce qui pouvait en ressortir. Visiblement, sans succès. Sur un coup de tête, elle revint à l’affichage précédent, accédant au profil de Clay Jackson.

Sous son nom et son image, ainsi que ses données d’état civil, se trouvaient quelques liens qui menaient à des sections plus conséquentes. L’un de ces liens concernait les affiliations connues, et Zoe cliqua sur celui-ci pour continuer à parcourir le texte.

« Attends une seconde, » dit-elle, remarquant quelque chose qui lui revint en mémoire. « Alicia Smith. Ça semble être un nom banal, mais…

Elle se leva, récupérant le dossier de John Dowling sur la table du milieu, là où elles l’avaient laissé. Elle feuilleta quelques pages avant de trouver enfin ce qu’elle cherchait.

« Qu’est-ce que c’est ? » demanda Shelley, la regardant d’un air anxieux, ses doigts jouant avec le sautoir en forme de flèche qui pendait autour de son cou.

« Alicia Smith. Interrogée il y a quelques jours par des officiers en uniforme dans le cadre de l’enquête sur la mort de John Dowling.

– Quel est son lien ? »

Zoe sourit, quelque peu victorieuse. « Alicia Smith est la mère de John Dowling.

– Mais que… » Shelley se pencha en avant, examinant à nouveau l’écran. « Attends. Alicia Smith est aussi la tante de Clay Jackson, du côté de sa mère.

– John Dowling est le cousin de Clay Jackson. C’est ainsi qu’il est lié à Callie Everard. »

Et d’un coup, toutes les pièces se mettaient en place.

Shelley se mit en action, tapant sur l’écran de Zoe et déplaçant la souris avec frénésie, tandis que la page se rechargeait. « J’ai les détails de la libération conditionnelle de Cesar Diaz. On ferait mieux d’aller lui rendre visite.

CHAPITRE DIX

Zoe regardait du côté de la pièce où elle s’était rendue pour examiner ostensiblement les certificats accrochés au mur. De là, elle pouvait voir et écouter, mais elle ne se sentait pas de prendre part à la conversation avant d’en être prête.

Craig Lopez ne ressemblait pas à un agent de libération conditionnelle ordinaire, du moins pas à l’image qui venait à l’esprit en évoquant le terme. Il était costaud, mesurait un mètre quatre-vingt-treize et pesait environ quatre-vingt-dix kilos. Par ailleurs, la plupart des muscles qui dépassaient du polo qu’il portait étaient abondamment tatoués. Des gribouillis aux œuvres d’art élaborées, il apparaissait évident qu’il s’imbibait d’encre depuis très longtemps.

Puis il y avait la cicatrice irrégulière sur le côté de son cou, là où une balle avait autrefois traversé sa chair sans le tuer.

De toute évidence, il avait été embauché en raison de son profile unique. Ayant été membre de plusieurs gangs dans sa jeunesse, il pouvait s’adresser à ceux qui y trempaient encore, d’égal à égal. Il connaissait leurs codes.

« César a de nouveau des ennuis, » demanda-t-il, l’air grave et déçu. « Il m’a juré qu’il allait arrêter. Quitter le gang pour quelque chose de mieux.

– Nous n’en sommes pas encore sûres, précisa Shelley. Nous devons l’interroger. »

Craig ouvrit le tiroir d’un classeur et en feuilleta le contenu, avant d’en extraire une feuille de papier. « Voici son adresse de libération conditionnelle. Vous devez procéder avec prudence. S’il est à nouveau mêlé à des affaires de gang, il aura probablement une garde rapprochée. Il a fait de la prison à leur place, il a par conséquent acquis un certain prestige. Ils voudront le protéger. Si vous y allez toutes griffes dehors, ils pourraient mal réagir.

– Compris, dit Shelley. Si nous y allons seules, juste nous deux ? Montrer que nous voulons uniquement discuter ? »

Craig inclina la tête. « C’est plus sûr. Mais assurez-vous que quelqu’un sache où vous êtes. Juste au cas où. »

Shelley inspira de façon saccadée, en hochant la tête. Zoe le remarqua, en se disant que Shelley ne s’était probablement jamais retrouvée dans ce genre de situation auparavant. Avec la façon dont elle se comportait, on en oubliait facilement qu’elle n’avait quitté Quantico que depuis peu. Il y avait beaucoup de situations qui allaient encore lui sembler déstabilisantes, insolites et nouvelles.

Zoe elle-même ne pouvait pas dire qu’elle était totalement à l’aise vis-à-vis des gangs.

« Vous êtes en quelque sorte un expert local de ces gangs ? » demanda Zoe, adressant sa question à Craig.

Il leva les yeux, surpris – c’était la première fois qu’elle prenait la parole depuis le début de la conversation – et haussa les épaules. « Je suppose qu’on peut dire ça. C’est du moins ce qui s’en approche le plus, de ce côté de la loi. Pourquoi ? Vous avez besoin d’informations ?

– Il s’agit de Clay Jackson, l’homme que Cesar a probablement tué, dit Zoe.

– Oh, il l’a tué. Il l’a juste fait assez proprement pour qu’ils ne puissent pas l’attraper, dit Craig. Je l’ai quasiment entendu se confesser, bien qu’il soit trop malin pour clairement l’avouer. »

Zoe hocha la tête, satisfaite d’avoir au moins obtenu la confirmation. « Sa tante, Alicia Smith. Elle a été interrogée sur le meurtre, à l’époque. »

Craig plissa des yeux et les leva vers le plafond, en réfléchissant. « Je ne suis pas sûr que ce nom me dise quelque chose.

– Son fils, John Dowling, est l’une des victimes de meurtres sur lesquelles nous enquêtons actuellement.

Craig comprit l’allusion. « Vous me questionnez sur leur relation. Si Cesar allait assassiner ce John Dowling une fois en liberté, pour faire un coup d’éclat.

– Précisément. »

Craig mordilla ses lèvres, en faisant claquer ses doigts sur son bureau. « Je ne le conçois pas. Clay Jackson était à l’image de ces gars. Le gang était sa famille. Les vrais liens du sang n’étaient pas aussi importants. Autant que je me souvienne, il avait perdu le contact avec la plupart de ses proches. Ses parents ne voulaient rien avoir affaire avec un fils qui était membre d’un gang. »

C’était intéressant. C’était un vide dans leur théorie, mais encore une fois, ce n’était pas une preuve. Craig connaissait ces hommes, mais il ne faisait pas partie des gangs. Plus maintenant. Il y avait des choses qu’ils pouvaient peut-être cacher à ses soupçons.

« Merci, » dit Shelley, en s’approchant pour lui serrer la main. « Nous vous contacterons si nous avons besoin d’autre chose. »

***

L’adresse indiquée sur le bout de papier que Craig leur avait écrit était un immeuble de plain-pied décrépit, avec de vieilles voitures délabrées, stationnées devant ce qui avait dû être la cour d’entrée. L’une d’entre elles avait des parpaings à la place des pneus. Ce n’était pas exactement ce à quoi on pouvait s’attendre de la maison d’un baron de la drogue.

Peut-être que Craig avait raison, et que Cesar était vraiment hors-jeu. Cela ne voulait pas dire qu’il en avait terminé avec sa vengeance, pensa Zoe, se mordillant la lèvre en examinant les lieux.

Il ne semblait y avoir personne de menaçant aux alentours. Personne ne les scrutait par les fenêtres ou par les porches, aucune voiture ne circulait lentement dans le quartier. Aucun signe d’activité dans la maison.

« Nous devrions entrer, » déclara Zoe, en ouvrant la portière côté conducteur et en sortant.

Shelley l’imita, après quelques instants. Ce n’était pas une longue hésitation, mais une hésitation tout même. Zoe se demandait si Shelley avait peur de suivre cette piste avec les gangs. Quoiqu’il se passe, elles allaient devoir l’examiner d’une manière ou d’une autre. Peu importe le retard qu’elles provoqueraient, elles allaient finir par aboutir ici à un moment donné.

Zoe essaya de faire preuve d’une assurance qu’elle-même ne ressentait pas vraiment en s’approchant de la porte d’entrée et en frappant fort, de trois coups secs qui ne pouvaient manquer d’être entendus dans toute la petite maison.

Pas de réponse.

Elle échangea un regard avec Shelley, qui se tenait maintenant tout près derrière elle, et frappa à nouveau. Plus fort. Cinq fois. Pas si facile à ignorer.

Il n’y avait rien. Pas le grincement d’une lame de parquet ou un mouvement derrière les frêles rideaux. La fenêtre du salon, visible de l’endroit où elles se trouvaient, donnait sur une pièce vide.

« Il n’y a personne ici, » dit Zoe au bout d’un moment, estimant qu’elles n’avaient pas été simplement ignorées.

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