Le Visage du Meurtre - Блейк Пирс 2 стр.


La Dr. Monk acquiesça d’un air pensif. Elle souriait d’une manière encourageante, comme si Zoe allait réellement déboucher sur quelque chose. La partie d’elle qui désirait l’attention positive et l’affection qu’elle n’avait jamais reçues de sa mère en était ravie, même si elle ne le souhaitait pas. Être en thérapie n’avait eu pour effet que de révéler ses défauts. « Et Shelley ? A-t-elle des racines ? »

Zoe acquiesça d’un hochement de tête, tout en déglutissant. « Elle a un mari et une jeune fille, Amelia. Elle parle beaucoup d’elle. »

La Dr. Monk posa le stylo contre ses lèvres et l’y tapota trois fois de façon entendue. « Tu désires une famille à toi. »

Zoe leva soudainement les yeux, puis se rappela ne pas être surprise qu’un thérapeute puisse discerner les pensées les plus authentiques qui se cachent derrière tout ce que l’on raconte. « Oui, » dit-elle simplement. Il n’y avait pas de raison de nier. « Mais j’en suis très loin.

– Quand nous nous sommes rencontrées pour notre première séance, tu m’avais dit que tu avais eu un rendez-vous. » Zoe remarqua que la Dr. Monk n’avait pas eu à consulter ses notes pour dire cela. « Il t’a contactée, n’est-ce pas ? As-tu répondu ? »

Zoe fit non de la tête. « Il m’a envoyé quelques emails et a essayé de m’appeler. Je n’ai pas répondu.

– Pourquoi ? »

Zoe haussa les épaules. Elle ne pouvait pas dire exactement pourquoi. Gênée, elle toucha quelques mèches de ses cheveux bruns qu’elle portait coupés court, plus par commodité que par goût. Il y avait chez elle beaucoup de choses qui n’était peut-être pas attirantes de manière classique et elle le savait, même si elle ne saisissait pas véritablement comment les autres la percevaient. « Peut-être parce que la première rencontre a été très gênante. J’avais l’esprit ailleurs. Je ne pouvais pas me concentrer sur ce qu’il racontait. J’ai été ennuyante.

– Mais il n’a pas pensé cela de toi, n’est-ce pas ? Ce… ?

– John.

– Ce John, il semble être intéressé. Il cherche toujours à te contacter. C’est bon signe. »

Zoe acquiesça d’un signe de tête. Elle ne pouvait plus rien dire. La Dr. Monk avait raison, même si elle ne voulait pas l’admettre.

« Laisse-moi te dire ce que je vois, » continua la Dr. Monk. « Tu m’as déclaré que Shelley a la vie dont tu rêves. Elle est heureuse, mariée avec une enfant, elle s’épanouit dans sa carrière, elle a des compétences que tu n’as pas. Nous serons toujours jaloux de ceux qui peuvent faire ce que nous ne pouvons pas. C’est la nature humaine. L’important, c’est que tu ne te laisses pas ronger par cela et que tu te concentres sur les choses que tu peux accomplir. »

Elle attendit que Zoe acquiesce de nouveau, lui indiquant qu’elle écoutait, avant de continuer.

« Les choses n’arrivent pas d’elles-mêmes. Ou pour le dire autrement, il est peu probable que tu te maries si tu ne sors pas. Je te conseille d’appeler John et de sortir de nouveau avec lui. Peut-être que cela se passera mal. Peut-être que cela va très bien se passer. La seule façon de savoir, c’est d’essayer.

– Vous pensez que je devrais me marier avec John ? dit-elle en fronçant les sourcils.

– Je pense que tu devrais sortir de nouveau avec lui. » La Dr. Monk sourit. « Et si cela ne marche pas, tu devrais sortir avec quelqu’un d’autre. C’est ainsi que l’on atteint ses objectifs. Petit à petit. »

Zoe n’était pas tout à fait convaincue, mais elle acquiesça tout de même. De plus, elle avait quelque chose d’important à régler maintenant. « Je pense que c’est la fin de notre séance. »

La Dr. Monk rit. « C’est ma réplique, » dit-elle en se levant pour accompagner Zoe à la porte. « Et ne crois pas que je suis facilement distraite. La prochaine fois, nous reviendrons à ce problème de repères sociaux et de perception différente des autres. Nous irons au fond des choses, même si tu n’es pas prête à te livrer à moi. »

En sortant du cabinet, Zoe évita le regard de sa thérapeute, ne voulant pas révéler qu’elle espérait sincèrement que la Dr. Monk oublierait.

CHAPITRE DEUX

Au moins, le déjeuner était quelque chose dont Zoe pouvait s’enthousiasmer. Cela faisait longtemps qu’elle n’avait pas pu voir son mentor en personne et elle avait attendu le rendez-vous avec impatience. L’idée que quelque chose de bien l’attendait après l’avait aidée à tenir durant la séance de thérapie.

La Dr. Francesca Applewhite, une professeur de mathématiques qui avait travaillé à l’université de Zoe, s’est avérée être l’une des meilleures rencontres que Zoe avaient eues dans sa vie. À l’époque, encore adolescente et complètement dépassée par l’ambiance de la résidence universitaire, elle fut sceptique à accepter encore un rendez-vous avec un spécialiste. Mais il se trouva que la docteur la comprenait totalement. Elle vit que Zoe avait une aptitude spéciale qui nécessitait d’être nourrie. Elles commencèrent avec des cours particuliers destinés à élever ses compétences à un autre niveau académique. Tout le reste découla de cela.

« Docteur, » salua Zoe lorsqu’elle atteignit leur table et se laissa tomber sur une chaise libre. Jugeant par la tasse de café à moitié vide et le livre de poche écorné qu’elle tenait dans ses mains, la Dr. Applewhite devait sûrement être là depuis un bon moment. Zoe ne put s’empêcher de remarquer les reflets gris qui gagnaient, mèche après mèche, ses cheveux autrefois bruns ; un contraste frappant avec la version de la docteur dont elle se souvenait lors de leur première rencontre.

La Dr. Applewhite glissa un signet entre les pages et posa le livre de côté, puis leva ses yeux en souriant. « Mon étudiante préférée. Comment le Bureau se comporte avec toi ? »

Elle avait une bonne raison de lui poser cette question. Après tout, ce fut sur ses conseils que Zoe entama une carrière dans les forces de l’ordre. Après que sa collègue – une des professeurs de math de Zoe – les avait mises en contact, la vie entière de Zoe avait changé. Elle savait exactement qui remercier pour cela.

« Bien. Ma nouvelle partenaire va bien, » dit Zoe. Elle prit le menu et le balaya du regard mais sans réel besoin. Elle savait déjà ce qu’elle allait commander. Un rapide coup d’œil sur les dimensions des colonnes et des lignes du menu lui suggéra que rien de nouveau n’avait été ajouté, et elles se retrouvaient toujours ici pour déjeuner.

La Dr. Applewhite se pencha pour faire signe au serveur et, tandis qu’elle le regardait s’approcher, Zoe observa la docteur. Elle se souvint de leur premier rendez-vous. La façon dont la Dr. Applewhite s’était véritablement intéressée à ce qu’elle avait à dire, l’une des rares personnes dans sa vie qui l’aient vraiment écoutée. Cette femme plus âgée avait pris quelques kilos en plus depuis, mais elle n’avait pas perdu une once de la compassion qu’elle avait témoignée envers une jeune femme qui n’avait aucune idée de sa place dans le monde.

Leur relation s’était développée au fil du temps. Zoe fut lente à lui faire confiance, à s’ouvrir à elle. Mais elle finit un jour par prendre le risque et à lui avouer son secret ; à tout lui raconter sur les chiffres.

Ce ne fut pas facile. Après tant d’années à entendre sa mère lui dire que ses aptitudes lui avaient été données par le diable, les r mots restèrent souvent coincés dans sa bouche. Mais la Dr. Applewhite se montra enthousiaste plutôt qu’horrifiée d’en connaître davantage sur les aptitudes de Zoe. C’est à partir de ce moment que leurs liens ne firent que se renforcer.

« Et la Dr. Monk ? », demanda la Dr. Appelwhite, les yeux brillants, après que Zoe eut passé sa commande. « Elle m’a raconté tu avais suivi mon conseil. »

Zoe ne put s’empêcher de rire. « Vous me surveillez ?

– Je dois toujours garder un œil sur mes préférés, » répondit la Dr. Applewhite en riant. C’était leur blague à elles. La Dr. Applewhite ne devrait pas, bien sûr, avoir de préférés. Mais à bien des égards, Zoe l’avait aidée dans sa carrière tout autant que la Dr. Applewhite avait lancé Zoe dans la sienne. La Dr. Applewhite avait fini par se spécialiser dans l’étude de la synesthésie appliquée en mathématiques et aujourd’hui, elle formait d’autres personnes qui avaient les mêmes aptitudes que Zoe. Plus ou moins, en tout cas.

« Les séances se passent bien, admit Zoe. La Dr. Monk a des observations intéressantes. Je comprends pourquoi vous l’appréciez.

– Elle a une très bonne réputation. As-tu fait des progrès dont tu pourrais me parler ? Ou est-ce trop personnel ? »

Zoe haussa les épaules tout en examinant les deux pouces d’eau au fond du vase qui se trouvait sur leur table et qui ne suffiraient pas à abreuver bien longtemps les deux chrysanthèmes. Ses calculs mentaux du temps qu’il faudrait pour qu’elles se fanent totalement l’amusèrent assez pour qu’elle s’autorise de dire ce qui la préoccupait. « Elle a dit que je devrais sortir plus. »

La Dr. Applewhite sourit affectueusement, sa propre alliance scintillant à la lumière du soleil lorsqu’elle porta la tasse de café vers ses lèvres. « Elle pourrait avoir raison.

– Je ne pense vraiment pas que ça soit la solution à tous mes problèmes, » soupira Zoe, rapprochant de sa bouche la tasse de café fumante apportée par le serveur.

« Peut-être pas à tous, mais à quelques-uns, » répondit sérieusement cette fois-ci la Dr. Applewhite. « Je ne dis pas que tu dois te sentir mal d’être qui tu es. Tu es opérationnelle – plus que ça. Tu l’as transformé dans un atout dans ton travail. Les autres ne sont pas aussi capables que toi. Je m’inquiète seulement pour toi. Vraiment, tu sais. »

Zoe hocha la tête. « J’apprécie, » dit-elle. En y réfléchissant bien, elle se rendit compte que la Dr. Applewhite était la seule personne au monde à se soucier véritablement d’elle. Cela la rassura, d’avoir au moins une personne.

Avant même d’avoir eu le temps de terminer sa pensée et de prendre au sérieux la recommandation d’appeler John, son portable sonna dans sa poche. Zoe le saisit et décrocha en voyant apparaître le nom de Shelley sur l’écran.

« Agent Special Zoe Prime.

– Salut, Z. J’espère que tu ne fais rien de beau en ce moment. »

Zoe poussa un soupir, baissant les yeux sur son assiette à moitié finie. Ce n’était pas comme si elle avait pu savourer son plat, ayant la tête ailleurs. « Je devine que nous avons une nouvelle affaire.

– Je te rejoins QG dans trente minutes. Le chef dit que c’est une grosse affaire. »

Zoe s’excusa en souriant à la Dr. Applewhite, mais la docteur lui faisait déjà signe de partir. « File faire ton devoir, Agent. Mais il y a une dernière chose que je dois te dire… » La Dr. Applewhite hésita, tout en inspirant. Elle semblait réticente à parler, mais elle finit par se lancer, les yeux baissés en direction de l’assiette à moitié finie de Zoe : « Quelqu’un de mon groupe de recherche – un autre synesthète. On pensait qu’il allait mieux mais…  Je suis désolée de le dire, mais il s’est tué la semaine dernière. Sans un groupe de soutien, si ce n’est moi, il avait du mal. Les êtres humains ont besoin d’avoir d’autres êtres humains autour d’eux pour les épauler émotionnellement. On en a tous besoin. Même ceux qui pensent un peu autrement. »

Zoe s’arrêta, et fixant du regard sa tasse de café et les quelques millimètres d’espace entre le café et le bord de la tasse, elle s’enfonça dans sa chaise. Elle n’était jamais allée à la rencontre d’aucun des membres du « groupe de recherche » de la Dr. Applewhite – les sujets d’expérience, comme les appelait Zoe dans sa tête quand elle était méchante – mais tout de même, c’était dur à entendre. Quelqu’un comme elle qui avait voulu mourir pour la seule et unique raison qu’il était exactement comme elle. C’était quelque chose de bien difficile à avaler.

Elle prit machinalement son sac et s’éloigna sans vraiment regarder autour d’elle. Dans sa tête, elle réordonnait ses pensées, se rappelant les commentaires de la Dr. Monk. Travaille vers tes objectifs. Petit à petit.

Qu’avait-elle dans sa vie, en fait ? Une mentor qui était la personne la plus proche d’une figure maternelle. Une partenaire, Shelley, qui incarnait ce qu’on pourrait désigner comme une amie. Deux chats, Euler et Pythagore et, bien qu’elle les aimât tous les deux, elle savait que c’était dans leur nature de chats de s’en sortir si elle disparaissait et ils vivraient avec quelqu’un d’autre. Une carrière qui semblait être plus instable qu’ascendante, même si actuellement, c’était plutôt pas mal. Un petit appartement qu’elle pouvait qualifier de « chez soi ».

Et une aptitude, ou un état, ou peu importe le terme, qui la rendait tellement différente qu’il poussait les gens comme elle à se suicider.

C’était une pensée qui donnait à réfléchir.

CHAPITRE TROIS

Zoe marcha à grands pas le long des couloirs de l’immense bâtiment du QG FBI à Washington, DC, en direction de la salle de réunion où Shelley avait dit qu’elle allait l’attendre. Ce genre de bâtiments rassurait Zoe : construit il y a bien longtemps mais avec suffisamment d’organisation et de logique pour qu’il soit facile de se repérer et se déplacer à chaque étage.

Le bâtiment J. Edgar Hoover avait été construit à dessein. Même si de l’extérieur, il était carré et gris, le genre d’architecture que les gens qualifient d’horreur, la composition géométrique, monolithique était ce que Zoe aimait le plus. Les couloirs bifurquaient exactement de la même manière, quel que soit l’endroit d’où l’on sortait de l’ascenseur, et les pièces étaient numérotées selon un ordre logique. La pièce 406, naturellement, était la sixième porte devant laquelle on débouchait en s’arrêtant au quatrième étage. Ceci était particulièrement appréciable. Tous les bâtiments n’étaient pas créés égaux.

Bien entendu, Shelley attendait déjà dans la salle de réunion, étudiant des notes et des photographies couleur disposées à intervalles réguliers le long d’une table de réunion. Elle leva les yeux et sourit quand Zoe entra.

Zoe avait du mal à comprendre comment Shelley, avec un jeune enfant à la maison et sans être particulièrement avantagée par la distance depuis la maison, avait pu arriver avant elle au QG. Non seulement cela, mais comment pouvait-elle être si bien habillée, dans un ensemble qui épousait à merveille ses formes rondes mais sveltes, tout en mettant en valeur le galbe de ses hanches, sa taille et ses seins, sans une seule trace de la saleté habituelle à laquelle on pourrait s’attendre au contact d’un enfant. Comment pouvait-elle même être si bien maquillée, avec sa bouche subtilement réhaussée d’une touche de rouge à lèvres rose et ses cheveux blonds proprement noués en un élégant chignon. Elle y parvenait pourtant.

Leur chef, l’Agent Spécial Superviseur Leo Maitland, se tenait debout à l’avant de la pièce, attendant avec l’impatience d’un jaguar prêt à bondir sur sa proie. C’était un vétéran de l’armée, avec l’allure d’un soldat et qui, après une carrière auréolée de succès de grade en grade, rentra chez lui pour rejoindre les forces de l’ordre. C’était il y a quinze ans, mais les cheveux grisonnants sur ses tempes n’indiquaient en rien qu’il n’était plus le guerrier qu’il fut à l’époque. Il mesurait un mètre quatre-vingt-dix, avec un tour de poitrine de cent-quatorze centimètres et des biceps de trente-huit centimètres qui se contractaient encore aux plis de son uniforme.

« Ah, Agent Spécial Prime, » dit-il. « Bienvenue. J’ai transmis les notes d’informations à votre partenaire. Asseyez-vous, s’il vous plait, et parcourez-les. »

Zoe suivit l’ordre et s’assit, posant un gobelet de café devant Shelley. C’était devenu une de leurs habitudes. Zoe apportait le café et Shelley menait les conversations courtoises nécessaires tout au long d’une affaire. Chacune s’occupait de quelque chose qu’elle pouvait gérer.

« L’Agent Spécial Rose a toutes les informations, mais je vais vous en donner un aperçu. On a déjà deux morts sur le dos, et ceci a l’air d’être une affaire locale, donc vous ne devriez pas avoir à vous déplacer. » Maitland croisa ses bras sur son torse, ce qui fit se tendre le tissu de son costume autour des épaules. « La presse locale va nous mettre la pression, sachant que l’une des victimes était très en vue dans la communauté. Vous vous doutez certainement de l’urgence d’éviter un troisième meurtre et de nous prémunir de ce que les journalistes ne nous collent pas l’étiquette « criminel en série ». »

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