Le Look Idéal - Блейк Пирс 5 стр.


D’abord, elle ne l’avait vu que deux ou trois heures auparavant. Même si Garland Moses était le profileur le plus décoré du pays, il n’était pas un super-héros. De plus, s’il avait des informations, il la tiendrait sûrement au courant. S’il ne lui disait rien, cela signifiait probablement qu’il n’avait rien trouvé d’intéressant.

Ensuite, ils s’étaient mis d’accord pour ne communiquer qu’en tête-à-tête. Même si le capitaine Decker n’avait pas encore formellement interdit à Jessie de s’impliquer dans cette affaire, il le ferait bientôt, c’était certain. S’il était prouvé que Jessie avait tenté de contourner cette directive, cela pourrait compromettre sa carrière et, comme Garland l’avait dit, gâcher sa « jolie petite enquête ».

Pourtant, cela l’obsédait. Elle était en train d’enquêter sur la mort d’un homme qui avait visiblement plusieurs choses à cacher. Entre temps, une jeune fille innocente était détenue par un tueur en série pour la seule raison qu’elle avait le même ADN qu’un autre tueur en série.

La frustration monta dans sa poitrine et elle eut énormément de mal à la ravaler.

Garland Moses ferait mieux de trouver quelque chose et vite, parce que je ne sais pas combien de temps je vais pouvoir tenir avant de craquer.

*

Quand ils arrivèrent à Hancock Park, au manoir de Gordon Maines, Jessie ne fut pas étonnée.

Elle savait déjà qu’ils avaient affaire à un homme qui était prêt à payer 400 dollars pour tromper sa femme dans une chambre d’hôtel, un homme qui détenait apparemment une carte de crédit associée à une société écran, ce qui indiquait probablement que ses finances étaient aussi peu claires que sa vie. De plus, apparemment, il habitait dans une maison qu’aucun fonctionnaire n’aurait pu acquérir, à moins d’en hériter.

Quand ils montèrent les marches jusqu’à la porte de devant, Jessie se rappela qu’il ne fallait pas qu’elle inflige son dégoût pour la victime à sa femme, qui pensait peut-être son mari capable de décrocher la lune et allait apprendre qu’il en était autrement. Ryan sonna et ils attendirent, tous les deux inquiets de ce qui allait se passer.

La porte fut ouverte par une petite femme svelte de la quarantaine finissante. Elle portait un tailleur brun clair et ses cheveux blonds étaient attachés en chignon. Malgré son apparence professionnelle, Jessie voyait qu’elle était mal en point.

Sous les yeux, elle avait des cernes impossibles à masquer, même avec beaucoup de maquillage, comme elle avait courageusement essayé de le faire. Ses yeux en eux-mêmes étaient rouges, ce qui pouvait indiquer, entre autres choses, qu’elle n’avait pas dormi, avait pleuré ou pris des drogues. Aucune de ces possibilités n’était bonne. Son bas droit avait une échelle très visible mais qu’elle semblait ne pas avoir remarquée, ce qui suggérait qu’elle avait les pensées ailleurs.

– Que puis-je faire pour vous ? demanda-t-elle d’une voix éraillée.

– Bonjour. Êtes-vous Margo Maines ? demanda gentiment Jessie.

– Oui, dit-elle avec prudence. De quoi s’agit-il ?

Jessie regarda Ryan, qui semblait prêt à donner la nouvelle qui, comme ils le savaient, allait la briser. Elle l’avait vu le faire à de nombreuses reprises et elle voyait la même réaction maintenant, sa colonne vertébrale qui se raidissait comme s’il se préparait à accepter le contre-coup émotionnel qu’il allait recevoir. Soudain, quand elle pensa au nombre de fois où il avait dû se retrouver dans cette situation au cours de sa carrière, une vague d’empathie la submergea. Elle ressentit un désir intense de le protéger contre cette situation cette fois-ci et avança légèrement.

– Nous sommes de la Police de Los Angeles, dit-elle avant qu’il n’ait pu prononcer un seul mot. Je suis Jessie Hunt et voici l’inspecteur Ryan Hernandez. Je crains d’avoir une mauvaise nouvelle à vous annoncer, Mme Maines.

Margaret Maines, ou ‘Margo’ comme on l’appelait dans la bio de son mari publiée sur le site web de la ville, semblait savoir ce qui arrivait. Elle baissa la tête, tendit une main et agrippa l’encadrement de la porte. Ryan avança légèrement au cas où elle s’effondrerait.

Heureusement, ce ne fut pas nécessaire. Margaret Maines les regarda à nouveau avec une résolution que Jessie admira, même si elle semblait fragile.

– Entrons, dit Mme Maines. Je pense que j’aimerais m’asseoir avant que vous m’en disiez plus.

Jessie et Ryan la suivirent dans le salon, où elle s’assit sur la causeuse et leur fit signe de s’asseoir sur le sofa d’à côté. Une fois qu’ils furent tous installés, elle les regarda tous les deux et hocha la tête.

– Allez-y, dit-elle d’un air résigné.

Jessie continua sans regarder Ryan pour voir s’il acceptait qu’elle prenne les devants.

– Je dois malheureusement vous annoncer que votre mari est mort, Mme Maines. Son corps a été trouvé ce matin dans un hôtel du centre-ville. Son identité a été récemment confirmée.

Mme Maines hocha la tête, inspira profondément et tendit la main pour prendre un mouchoir en papier. Elle se sécha les yeux puis répondit.

– Je savais qu’il y avait un problème. Il n’est pas rentré hier soir. Parfois, il travaille très tard, mais il m’appelle toujours. De plus, il n’a pris aucun de mes appels. J’ai même envisagé d’appeler la police. Cependant, j’ai imaginé qu’il dormait dans son bureau et que son téléphone était en mode silencieux ou que la batterie était à plat. Je n’ai pas voulu dramatiser. J’ai appelé le bureau ce matin et ils ont dit qu’il n’était pas encore arrivé. Je savais qu’il y avait un problème. J’étais sur le point de vous appeler.

– Pourquoi ne l’avez-vous pas fait ? demanda Jessie d’un ton non-accusateur.

– Gordon était très exigeant. Il détestait que les journaux parlent mal de lui. Dans ma tête, je l’imaginais dire : « Si tu appelles la police, ça finira dans les journaux puis au journal télévisé. À la prochaine élection, mon opposant en fera quelque chose de néfaste aussi innocent que ce soit. En politique moderne, il ne faut tolérer aucune erreur de relations publiques ». Il disait beaucoup qu’il voulait éviter que les journaux parlent mal de lui. Maintenant, je me demande si j’aurais pu empêcher sa mort en l’appelant.

Jessie pensa qu’il était ironique qu’un gars qui craignait d’avoir mauvaise réputation trompe sa femme à l’hôtel et finance ce qui paraissait être une caisse noire, mais elle garda cette réflexion pour elle-même.

– Ne vous faites pas de reproches, Mme Maines, dit Ryan. D’après ce que nous pouvons dire jusque-là, il semblerait que votre mari soit mort hier soir. Même si vous l’aviez appelé, vous n’auriez pas pu le sauver.

Elle sembla dériver une petite consolation de ce fait et soupira profondément, plus ou moins soulagée. Elle parut se demander s’il fallait qu’elle pose la question qu’elle avait en tête mais, finalement, elle coupa court à ses hésitations.

– Comment est-ce arrivé ?

Se sentant juste un peu lâche, Jessie considéra que les années d’expérience de Ryan pourraient s’avérer utiles dans ce cas-là et décida de le laisser répondre.

– Peut-être pourrons-nous garder les détails pour une autre fois, Mme Maines, suggéra-t-il gentiment.

L’air désespéré visible sur le visage de Mme Maines céda vite la place à un mélange d’irritation et de résolution.

– Dites-moi la vérité, inspecteur. Il est clair qu’il n’est pas mort de causes naturelles. Je le saurai tôt ou tard et je préférerais le découvrir dans l’intimité de ma propre maison que dans une morgue sinistre entourée par un groupe d’inconnus. Je préfère de loin deux inconnus à dix.

– Oui, madame, dit-il. Vous avez raison. Il n’est pas mort de causes naturelles. Je crains qu’il n’ait été étranglé jusqu’à la mort. Les circonstances qui entourent son meurtre sont quelque peu … obscènes. Dois-je poursuivre ?

– Je veux en prie, insista Mme Maines d’une voix atone.

– On dirait qu’il était à l’hôtel pour y retrouver une femme dont nous ne connaissons pas encore l’identité. Nous ne connaissons pas son mobile. Nous savons juste que votre mari a probablement été drogué, puis dévalisé et étranglé.

Jessie regarda les traits de Mme Maines se durcir. Elle ressentit une pointe d’anxiété et se demanda si Margo Maines allait hurler ou pleurer. En fait, elle ne fit ni l’un ni l’autre.

– Je suis tout à fait certaine qu’il a été drogué et dévalisé, insista-t-elle d’un ton vif en se redressant. Jamais Gordon ne serait allé retrouver une femme dans une chambre d’hôtel de son plein gré, à moins d’avoir perdu la tête.

Jessie se souvint de la vidéo du bar, où Gordon avait joyeusement flirté pendant une demi-heure avant d’aller réserver une chambre d’hôtel, tout cela sans avoir été drogué. Elle se demanda si elle devait mettre fin aux certitudes de son épouse mais décida que ce n’était pas son travail.

Un autre exemple de lâcheté morale.

– De toute façon, dit Ryan d’une voix qui suggérait qu’il désirait passer à autre chose parce qu’il ne voulait visiblement pas mettre fin aux certitudes de Mme Maines lui non plus, même si nous avons confirmation que c’est lui, il faudra que quelqu’un vienne au bureau du médecin légiste pour identifier formellement le corps. Si vous préférez qu’un de ses employés le fasse, nous pourrons arranger ça.

– Non, je le ferai, dit-elle.

– Merci, dit Ryan. Il y a une autre chose. Nous n’avons pas beaucoup de pistes sur la femme que nous soupçonnons du meurtre de votre mari, mais elle a quand même pris toutes ses cartes de crédit et toutes ses pièces d’identité.

– Et sa montre ? interrompit Mme Maines.

– Quelle montre ? demanda Ryan.

– Il avait une Rolex avec ses initiales gravées au dos.

– Nous ne l’avons pas trouvée sur la scène du crime, dit Ryan, mais nous l’ajouterons à la liste des objets manquants.

– Je lui ai offert cette montre pour notre dixième anniversaire de mariage, dit-elle en repensant visiblement à ce moment.

Jessie avait une idée mais décida de la remettre à plus tard. À contrecœur, Ryan remmena Mme Maines au moment présent.

– Nous ferons de notre mieux pour la récupérer, madame, lui assura-t-il. Cependant, en ce qui concerne les cartes de crédit, au lieu de les bloquer, nous comptons les surveiller en espérant que cela nous permettra de retrouver cette femme quand elle en utilisera une. Elle pourrait aussi essayer de contrefaire un nombre indéterminé de documents officiels à l’aide de la carte d’identité de votre mari. Nous donneriez-vous la permission d’examiner ses transactions et ses données financières pour voir s’il y a des anomalies ?

Mme Maines lui lança un regard sceptique, comprenant visiblement que sa requête devait cacher une arrière-pensée.

– Cela semble imprécis, fit-elle remarquer.

– Ça l’est, admit-il. Nous voulons ratisser aussi large que possible pour ne rien manquer. Nous pouvons demander une décision de justice si nécessaire, mais cela prend du temps et je crains que la coupable ne nous file entre les doigts avant cela, alors que, si vous signez les autorisations maintenant, nous pourrons commencer immédiatement.

Mme Maines avait encore l’air peu convaincue mais, vu la façon dont Ryan avait présenté les choses, si elle refusait, cela donnerait l’impression qu’elle entravait l’enquête sur le meurtre de son mari. Au bout d’un moment, il devint clair qu’elle avait décidé que, quelles que soient les choses qu’elle soupçonnait que son mari lui avait cachées, il allait falloir avant tout se concentrer sur la recherche de l’assassin.

– Donnez-moi les papiers, dit-elle durement.

Ryan, qui avait déjà l’enveloppe à disposition, les lui tendit. Jessie le vit se retenir de sourire et dut réprimer sa propre envie de lui envoyer un coup de pied.

Ryan avait eu de la chance que Margo Maines ne connaisse pas ses expressions aussi bien que Jessie. En général, les jeunes veuves n’appréciaient pas les sourires satisfaits.

CHAPITRE SIX

Jessie était agacée par Ryan.

De retour au poste, assis à leurs bureaux, ils examinaient des états financiers compliqués en attendant que l’équipe des techniciens trouve les origines de « City Logistics » et de ses ressources. Le capitaine Decker assistait à une réunion au quartier général, ce qui signifiait que Jessie avait encore réussi à éviter l’entretien où il lui interdirait inévitablement de s’intéresser à l’affaire concernant Hannah.

Entre temps, Ryan avait suggéré l’idée selon laquelle Margo Maines faisait semblant d’être triste, avait découvert que son mari la trompait et avait embauché une tueuse à gages pour l’éliminer, avec pour but de se venger, de toucher l’assurance-vie ou les deux à la fois. En fait, Ryan semblait être obsédé par cette idée.

– Elle ne m’a pas paru crédible, c’est tout, insista-t-il. Je ne la crois pas quand elle dit qu’il aurait fallu que Gordon soit drogué pour aller dans une chambre d’hôtel avec une autre femme. Tu as vu la vidéo du bar. Il était entièrement volontaire. Margo devait au minimum soupçonner que c’était un cochon.

– Je suis sûre qu’elle le soupçonnait, convint Jessie malgré son agitation, mais cela ne signifie pas qu’elle a demandé qu’on l’assassine. Peut-être trouvait-elle embarrassant d’avouer à deux inconnus qu’elle avait choisi d’ignorer la mauvaise attitude de son mari. Les femmes le font parfois, c’est connu.

Jessie avait répondu d’une voix égale pour que Ryan ne comprenne pas à quel point ce sujet de discussion la touchait encore. Son propre ex-mari, Kyle, l’avait trompée pendant des mois et, alors qu’il y avait eu des quantités de signes, Jessie avait d’une façon ou d’une autre réussi à n’en voir aucun.

Dans ses moments plus honnêtes, elle reconnaissait qu’elle avait peut-être évité intentionnellement de les voir parce que, si elle s’était confrontée à cette réalité, cela aurait détruit son couple et sa vie. Bien sûr, le désastre s’était quand même produit quand Kyle avait assassiné sa maîtresse, fait accuser Jessie du meurtre puis essayé de la tuer elle aussi. Cependant, ce n’était pas l’essentiel pour l’instant.

– Peut-être ne voulait-elle pas révéler qu’elle savait qu’il la trompait parce qu’elle était gênée, concéda Ryan. Ou alors, elle savait peut-être que, si elle l’admettait, cela lui donnerait un mobile.

Jessie ne voulait pas rejeter la théorie de Ryan. Elle n’était pas absurde et Ryan avait beaucoup plus d’expérience qu’elle. Cependant, il semblait ignorer d’autres éléments pertinents.

– Permets que je te pose une question, proposa-t-elle. Si c’était un meurtre commandité, pourquoi ne pas loger deux balles dans la tête de la victime ? C’est beaucoup plus rapide et plus sûr.

– Peut-être Margo Maines savait-elle que les détails du meurtre de son mari finiraient par être dévoilés. Son mari serait humilié et elle serait l’épousée martyre. Elle récolterait énormément de compassion et personne ne la soupçonnerait.

– Cela explique la situation de son point de vue, mais pas de celui de l’assassin, répliqua Jessie. La femme qui l’a tué a pris tout son temps. Même si on l’avait chargée de rendre la scène sordide, elle aurait pu s’en aller moins de quinze minutes plus tard. Elle y est restée deux fois plus longtemps. Elle s’est attardée. Ce n’est pas le travail d’une professionnelle. De plus, elle aurait pu se contenter de le droguer sans le tuer. Un politicien mort, nu et drogué que l’on retrouve dans une chambre d’hôtel, c’est assez embarrassant en soi. Pourquoi l’étrangler en plus ? Non. Ce meurtre a une touche personnelle.

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