Il Suffira D'Un Duc - Ingrao Sabine 4 стр.


Cela dit, on ne devrait pas non plus être ligoté aux montants des lits.

Curieusement, les actes de Margaret avaient semblé indiqués, mais elle fut envahie par une gratitude nouvelle pour lusage des escaliers et les raisons de leur incontestable popularité. Lescalade de façades nétait pas une activité courante, même pour les sportifs.

Margaret nétait pas sportive. Courir ne faisait quirriter sa généreuse poitrine, et sadonner à dautres exercices, qui consistaient à plier et contorsionner son corps dans détranges positions, la faisait se sentir ridicule.

Et pourtant, elle se tenait là, sur un balcon étroit.

Elle regarda en bas. Les invités ne faisaient plus la file à lextérieur de la résidence. La dernière chose dont Margaret avait besoin était que quelquun la remarque et crie « Au voleur ». Ou, encore pire, que quelquun la reconnaisse. Il ny avait aucune explication possible pour justifier quune débutante soit sur le balcon menant à la chambre à coucher dun duc. Après tout, aucun chaperon nétait à ses côtés. Pas même Grand-mère Agatha, quelle parvenait habituellement à inciter à laccompagner pour des visites qui présentaient moins dintérêt pour sa propre mère.

Margaret évalua la situation. Le problème dêtre cramponnée à un balcon était lair à présent frisquet. Des rafales de vent la frappaient continuellement, emportant sa robe couleur canari comme si elles étaient ravies davoir autant de tissu avec lequel jouer. Même si le vent décidait dêtre moins actif, lair glacial resterait tout de même piquant.

En-dessous delle, des calèches passaient, déposant parfois des passagers, ou emportant parfois ceux qui se contentaient de faire une brève apparition avant une longue nuit à errer de réception en réception.

La pluie éclaboussait Margaret, glissant le long de ses doigts. Elle avait déjà détruit ses gants de dentelle en essayant de rompre ses liens.

Margaret était contente de ne pas voir lexpression du duc mais même si elle ne voyait pas son visage, elle savait quil devait être horrifié.

Margaret remua les jambes. Des voix résonnèrent en dessous, et elle se tapit contre le balcon, souhaitant que larchitecte ait conçu la façade avec moins denthousiasme pour les colonnes. Personne navait à ce point besoin dun bâtiment ressemblant à un temple grec quand même en Grèce les gens avaient arrêté dadorer leurs dieux des siècles auparavant.

La voix de sa mère retentit. Elle allait fouiller le balcon.

Le cœur de Margaret saffola, se précipitant de-ci de-là, sans se préoccuper des autres vaisseaux sanguins du corps. Respirer devint de plus en plus difficile.

Elle devait se cacher.

Tout de suite.

Malheureusement, les balcons faisaient dhorribles cachettes.

Une idée lui vint. Margaret grimpa hâtivement par-dessus le rebord du balcon et plaça ses pieds sur le petit côté de la brique sur sa gauche.

Cela marchait, et Margaret rayonna. Dautres femmes auraient peut-être craint le manque de stabilité, mais Margaret avait réussi. Elle saccrocha à la balustrade en fer du balcon, et maintenant, si sa mère ouvrait la porte quand sa mère ouvrirait la porte Margaret serait cachée.

Cétait parfait.

La pluie continua à dégouliner sur son visage et ses mains ; elle continua à mouiller sa robe, mais cela navait pas dimportance. Une demi-heure plus tôt, elle avait été certaine quelle serait forcée dépouser le duc. Et, bien que lhomme nait montré aucun signe de cruauté, elle navait aucun désir dépouser un homme obligé de devenir son mari. Il saurait toujours quil était un duc, et quelle nétait quune jeune fille réservée introduite dans le beau monde par la seule force de la soudaine abondance dargent de son père.

Ohé ! Là-haut ! cria un homme.

Margaret se figea. Sa robe navait aucune chance de se fondre dans le mur de briques, et elle maudit le fait que le duc de Jevington nait pas manies excentriques qui lauraient incité à ordonner que les briques soient peintes dune couleur assortie au soleil. Au lieu de cela, la maison ressemblait à toutes les autres résidences de la rue. Seule la composition exacte des colonnes et des fioritures différait.

Descendez, jeune fille. Cest dangereux, là-haut ! cria lhomme.

Oh, bon sang.

Le vent souffla en rafale, mais échoua à emporter la voix de lhomme. La mère de Margaret allait fouiller le balcon dun instant à lautre, et cet instant arriverait plus tôt que prévu si cet homme continuait à faire étalage des capacités de son diaphragme.

Margaret jeta un regard vers le bas. Il était facile à repérer. Il portait une cape et un haut-de-forme, la livrée habituelle des cochers.

Margaret tourna le buste de manière peu élégante vers lhomme, même si se retourner quand on devait garder le pied sur le bord dune brique au-dessus dune fenêtre et garder les mains agrippées à la balustrade dun balcon, comptait parmi les choses les plus stupides à faire. Si seulement Margaret avait accordé plus dintérêt à la pratique sportive. Elle sétait toujours moquée des femmes qui estimaient ces manœuvres comme étant le sommet de leur journée, leur préférant les joies de la mémorisation de nouveaux faits scientifiques.

Margaret posa un doigt sur ses lèvres, espérant que lhomme se tairait.

Attention, ma petite dame ! brailla-t-il.

Elle répéta son geste.

Vous avez vu cette jeune femme ? cria lhomme en tournant la tête.

Margaret grimaça dembarras.

Lhomme nétait pas la seule personne à lextérieur. Aucun doute, dans quelques minutes, il aurait ameuté tous les cochers pour la regarder. Pire, il pourrait attirer lattention du majordome se tenant à lentrée, pour la regarder.

Silence ! articula-t-elle silencieusement.

La porte du balcon souvrit, et Margaret se figea. Puis la porte fut refermée dun claquement, avant que lhomme ne puisse à nouveau crier, et le soulagement envahit Margaret.

Elle était sauvée.

Elle essaya dajuster sa position, pour quelle puisse remonter sur le balcon et attendre jusquà ce que sa mère ait quitté la chambre du duc. Une bourrasque de vent la renversa presque, semblant désireuse dagrandir la déchirure de sa robe pour augmenter son indécence.

Les doigts de Margaret glissèrent. Elle lutta pour conserver sa prise, mais de la pluie tomba encore, enveloppant sa main de liquide glacé.

Le cœur de Margaret tressauta dincertitude, mais elle serra les dents.

Je peux y arriver.

Je dois y arriver.

Margaret se concentra pour raffermir sa prise autour de la balustrade, ne se préoccupant pas de savoir si elle avait lair ridicule depuis la rue.

Elle ne pouvait pas lâcher.

Lâcher signifiait probablement des blessures.

Lâcher signifiait probablement la mort.

Accrochez-vous, ma petite, cria lhomme. Ne tombez pas. Vous navez pas envie de vous tuer.

Les braillements de lhomme nétaient pas rassurants.

Cette fille va mourir, dit-il dune voix sonore. Ici, à Grosvenor Square. Imaginez un peu. Ça ne vaut pas le coup dêtre une voleuse, ça non.

Le cœur de Margaret bondit dans sa poitrine, et la pluie froide continua à larroser. Des gouttes se glissèrent sous son col, dégoulinant dans son dos avec plus de force que le champagne navait réussi à montrer.

Margaret claqua des dents, mais elle tint bon.

Dautres voix se firent entendre en-dessous delle, les roues dune calèche grincèrent sourdement, et un cheval hennit, mais Margaret tint bon.

Le processus restait difficile. Lépuisement montait en elle, et une douleur lui parcourut le bras. Le vent souffla en rafale dans sa direction, fouettant des boucles de cheveux sur ses yeux.

Ses doigts glissèrent.

Sapristi.

Margaret dégringola.

Elle agita les mains en lair, essayant de se raccrocher à quelque chose, nimporte quoi.

Ses boucles furent balayées hors de ses yeux, mais tout ce quelle vit fut de la grisaille.

Elle battit des bras vers le haut, comme sil pouvait y avoir quelque chose à agripper, mais il ny avait rien : cétait la fin.

Margaret sécrasa.

Elle rebondit.

Rebondir nétait pas le résultat auquel elle sétait attendue. Elle roula, puis tomba encore, atterrissant cette fois sur les pavés.

Elle était vivante. Cétait un état quelle avait pris pour acquis, mais quà présent, elle appréciait beaucoup.

De gouttes de pluie froides continuaient à atterrir sur elle, son corps était douloureux, et sa robe était maintenant à la fois déchirée et boueuse, mais cela navait pas dimportance.

Je suis vivante.

Elle soupira.

Avec délice.

Mademoiselle ?

Le majordome a lair sévère de tout à lheure descendit prestement dune calèche, suivit par le cocher bavard qui était sur le trottoir.

Margaret se releva péniblement des pavés. Son turban à plumes avait atterri dans une flaque de boue, et une plume avait été délogée de son perchoir. Bien que Margaret ait souhaité avoir une excuse pour ne pas le porter, la vision de son turban abimé manquait de la satisfaction quelle avait imaginée.

Le majordome lexamina avec la vigueur dun homme habitué à chercher la moindre tâche en polissant largenterie.

Vous allez bien ?

Oui.

Elle allait bien. Elle était debout, et ses mains fonctionnaient.

Margaret observa la calèche. De toute évidence, elle avait atterri sur le toit de la calèche et cela lui avait sauvé la vie.

Vous lavez déplacée pour moi ?

Le majordome hocha la tête.

Après que cet homme mait alerté, jai envisagé de rentrer et de vous atteindre par le balcon, mais jai pensé que ceci serait plus rapide.

Merci, dit-elle.

Vous auriez pu détruire cette calèche, aboya le cocher. Bien content que ce ne soit pas la mienne.

Il dirigea un regard sévère vers le majordome avant de reprendre.

Les calèches coûtent cher.

J-Je navait pas lintention de tomber, bégaya Margaret.

Le cocher fronça ses épais sourcils et lui lança un regard noir.

Il se tourna vers le majordome.

Dois-je aller chercher un vigile ? Elle était peut-être en train de cambrioler ! Une robe terriblement élégante, pour une vagabonde. Très suspect.

Le majordome lui adressa un sourire aimable.

Je pense que cest une invitée, Monsieur.

Une invitée ? dit le cocher dont les yeux sécarquillèrent. Vous en êtes certain ?

Il est difficile doublier une robe de cette nuance de jaune. Il en va de même pour ce turban.

Le majordome dirigea son regard avec gravité vers la flaque et son contenu détruit.

Les hommes continuèrent à parler, mais Margaret ne pouvait plus écouter. Elle devait partir.

Même les plus excentriques nétaient pas supposées escalader lextérieur des balcons ducaux. Margaret navait pas survécu pour être réprimandée davantage. Son statut dans le beau monde était déjà suffisamment bas. Elle navait certainement pas besoin de rumeurs disant quelle était une cambrioleuse. Elle ne pouvait pas rester là, mais elle ne pouvait pas retourner au bal avec une robe déchirée et boueuse non plus.

Des cochers lui jetèrent des regards curieux depuis leurs calèches, certains passant la tête sous la petite pluie fine.

Si seulement son propre cocher attendait là. Malheureusement, il ne passerait les prendre quà minuit. Le ciel était peut-être sombre, mais elle doutait quil soit déjà proche de cette heure, et Margaret navait aucun désir de lattendre.

Voulez-vous entrer à lintérieur ? demanda le majordome.

Margaret hésita.

Ne pas rester sous la pluie était tentant. Elle ne devrait pas rester ici et continuer à converser avec des cochers déconcertés. Un invité pourrait sortir de la résidence à tout moment. La présence de Margaret serait impossible à ne pas remarquer, et la réputation de Margaret deviendrait encore plus discutable.

Margaret navait peut-être pas été découverte au lit avec le duc, mais se retrouver seule, dans la rue, dans une robe déchirée et chiffonnée, nétait pas une franche amélioration.

Et pourtant

Même si elle ne pouvait absolument pas sattarder au dehors, elle ne pouvait pas saventurer à lintérieur. Il était évident quelle rencontrait plus de membres de la haute société à lintérieur.

Elle ferma très fort les yeux.

Sa mère avait réussi à ruiner sa réputation après tout, et tout ce que Margaret avait accompli, cétait de sassurer que le duc de Jevington ne soit impliqué dans aucun scandale.

Elle fronça les sourcils.

Elle était à Grosvenor Square.

Daisy vivait à proximité.

Margaret pouvait lui rendre visite, puisque Daisy ne serait pas au bal.

Vous devriez vraiment rentrer à lintérieur, dit gentiment le majordome.

Je devrais lembarquer pour voir si cest pas une criminelle, dit le cocher. Cest pas bon signe quand une femme cambriole une maison dans un beau quartier comme ça.

Je nallais pas cambrioler, protesta Margaret.

Alors quest-ce que vous alliez faire ? demanda le cocher. Ça ma tout lair dêtre ce que vous alliez faire, même si vous aviez une invitation.

Margaret le fixa du regard.

Le majordome et le cocher la dévisagèrent en retour.

Daccord.

Margaret remua les jambes.

Ça doit être une professionnelle, en plus, songea le cocher. Parce que je ne lai même pas remarquée en train de grimper.

Ce nétait plus le moment de réfléchir davantage, peu importe combien le processus de la réflexion était précieux en temps normal. Margaret partit en courant.

Elle souleva ses jupes pour éviter de marcher sur leur ourlet et se précipita dans la rue. Elle évita de regarder les calèches, comme si ne pas croiser les yeux des cochers signifiait quils ne remarqueraient pas une bourrasque jaune canari avec des boucles brunes.

Elle senfuit de Grosvenore Square, puis tourna dans une rue adjacente, puis une autre. Trop tard, elle prit conscience quelle navait même pas un réticule et navait dargent pour un fiacre.

Elle serra les dents.

Elle ne cherchait pas un fiacre pas encore.

Elle cherchait Daisy.

Enfin, elle arriva à la résidence de son amie.

Elle envisagea descalader jusquà la fenêtre de son amie. Mais contrairement aux héroïnes des romans de Loretta Van Lochen, elle ne sentait pas en mesure descalader limmeuble. Même le balcon du duc sétait révélé dangereux.

En outre, Daisy était sensée et naurait probablement pas laissé sa fenêtre ouverte. Cette partie de Mayfair était peut-être agréable, mais cela restait Londres, et de nombreuses personnes en manque dargent était au courant de la richesse de ce quartier.

Margaret lissa sa robe, consciente que de la boue formait des croûtes en divers endroits. Lisser sa robe nétait en rien comparable à laver sa robe, la sécher et la repasser, mais cela devrait suffire.

Elle saisit le heurtoir, le frappa et après un certain temps, le majordome ouvrit la porte.

Sil était indigné davoir été interrompu dans ses projets de repos nocturne, il ne lexprima pas à haute voix. Par contre, il ouvrit grand les yeux et fit la moue.

Je suis vraiment désolée, dit vivement Margaret. Mais je désirais parler à Miss Holloway.

Le majordome se renfrogna, et elle frissonna sous son regard dur.

Est-elle chez elle ? demanda Margaret dune voix tremblante.

Miss Holloway nest pas encline à batifoler en ville à des heures indues de la nuit.

La voix du majordome retentit dun ton autoritaire. Il excellait sans aucun doute à diriger les valets, apparaissant peut-être même dans leurs rêves après un incident particulièrement maladroit dans leur service.

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